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Loi ZAN pour Zéro Artificialisation Nette : pourquoi cela fait débat en France ?

Le Zéro Artificialisation Nette impose de concilier construction et protection des espaces naturels, une transformation clé pour l'immobilier neuf. © Shutterstock

Tags : Immobilier, construction, ZAN, Zéro Artificialisation Nette, Loi Climat et Résilience


La loi ZAN, inscrite dans la stratégie Climat et Résilience, ambitionne un Zéro Artificialisation Nette d’ici 2050. Un objectif écologique essentiel mais qui soulève de vifs débats au sein du secteur immobilier. Entre protection de l’environnement et défis urbanistiques, la loi ZAN s'impose dans le paysage français. Quel impact pour les promoteurs immobiliers et l'aménagement des territoires ?



La loi « Climat et Résilience », adoptée en 2021, a mis en place une réponse ambitieuse à l’artificialisation des sols et la bétonisation avec l'objectif de Zéro Artificialisation Nette, ZAN à l'horizon 2050. Mais qu'est-ce que cela implique exactement, et pourquoi cette loi suscite-t-elle un tel débat ? Quels sont les défis considérables que cela pose au secteur immobilier, en particulier aux promoteurs immobiliers ?

 

Définition : la loi ZAN, c’est quoi ? Qu’est-ce que le Zéro Artificialisation Nette ?

 

La loi ZAN, pour Zéro Artificialisation Nette, fait donc partie de la loi « Climat et Résilience » du 22 août 2021. Elle vise à limiter l’artificialisation des sols, c’est-à-dire la transformation des terres naturelles, agricoles ou forestières en zones construites ou aménagées. Concrètement, cela signifie qu'à l'horizon 2050, toute artificialisation de nouveaux espaces devra être compensée par la « renaturation » d'autres terrains artificialisés. En d'autres termes, ce qui est pris à la nature devra être rendu, afin de préserver la biodiversité, les terres agricoles et les écosystèmes essentiels.
La loi a également introduit un objectif intermédiaire : réduire de moitié la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers d’ici 2030 par rapport à la décennie 2011-2020. Cette approche vise à freiner l’étalement urbain dès à présent et à encourager la sobriété foncière, c'est-à-dire une utilisation plus rationnelle des terres disponibles, tout en répondant aux besoins en logements et infrastructures.

 

Qu’est-ce qu’un sol artificialisé ?

 

Un sol artificialisé est un terrain qui a été transformé par l’activité humaine pour des usages urbains, industriels ou de transport. Cela inclut les surfaces bâties, comme les maisons, les immeubles, les routes ou encore les parkings, mais aussi des terrains partiellement modifiés, comme les parcs urbains ou les terrains de sport. 
L’un des problèmes majeurs de l’artificialisation est qu’elle entraîne souvent l’imperméabilisation des sols, ce qui empêche l’infiltration de l’eau et aggrave les risques d’inondations. De plus, ces sols n'absorbent plus de CO2, ce qui contribue au réchauffement climatique.

 

Pourquoi avoir créé cet objectif de Zéro Artificialisation Nette ?

 

L’objectif ZAN est né de la nécessité de limiter la destruction des espaces naturels tout en prenant en compte les besoins des territoires. En France, entre 1981 et 2020, les surfaces artificialisées sont passées de 3 à 5 millions d’hectares, soit une augmentation de 70 %, alors que la population n’a crû que de 19 % durant la même période.

L’étalement urbain, accentué par le coût élevé du foncier en centre-ville et le désir des ménages de vivre en périphérie dans des logements individuels, a conduit à une consommation excessive de terres agricoles et naturelles. En plus de la perte de biodiversité, cette artificialisation contribue à l’amplification des îlots de chaleur dans les villes, ainsi qu’à la pollution de l'air et de l'eau.

L'objectif ZAN est donc un élément clé pour réduire ces impacts environnementaux, mais aussi pour préserver la capacité agricole du pays, essentielle pour la production et donc l’autonomie alimentaire. En intégrant ces enjeux écologiques dans les politiques d’urbanisme, la France se donne pour ambition de concilier développement urbain et protection de l’environnement.

 

Les échéances de l’objectif ZAN

 

L’échéance ultime du ZAN est fixée à 2050, avec un objectif intermédiaire dès 2030. D'ici là, les collectivités devront adapter leurs documents d’urbanisme (plans locaux d’urbanisme, PLU, schémas de cohérence territoriale, SCOT...) pour intégrer cet impératif de réduction de la consommation d'espaces naturels. 
La première tranche décennale (2021-2031) verra la France réduire de moitié sa consommation de terres agricoles, forestières et naturelles, par rapport à la décennie précédente. Cela laisse peu de temps aux acteurs de l’immobilier pour s'adapter à ces nouvelles règles, tout en répondant aux besoins croissants en logements et infrastructures.

 

Polémique : pourquoi la loi ZAN fait-elle débat ?

 

L’objectif de Zéro Artificialisation Nette soulève des débats importants, notamment en ce qui concerne sa mise en œuvre. Bien que la prise de conscience environnementale soit réelle, les acteurs de l'immobilier, les élus locaux et les collectivités expriment des inquiétudes face aux défis que cela représente. Parmi les principales critiques, on retrouve la difficulté à concilier développement économique et protection de l’environnement. 
En effet, certaines collectivités, en particulier celles en croissance démographique, estiment qu'il sera difficile de répondre aux besoins en logements tout en respectant les objectifs ZAN. L'immobilier neuf pourrait être directement impacté, avec des contraintes accrues sur l’utilisation des sols et des pressions pour la densification urbaine, souvent mal perçue par les habitants. 
Par ailleurs, les disparités régionales exacerbent les tensions. Les zones rurales, par exemple, risquent d'être freinées dans leur développement économique si de nouvelles infrastructures ne peuvent être construites sans compensation immédiate par la renaturation d'autres terrains. Ce qui soulève aussi la question des ressources financières nécessaires à la renaturation. Des fonds comme celui pour le recyclage des friches, initialement doté de 300 millions d'euros et augmenté à 650 millions d'euros, ont été mis en place, mais restent insuffisants selon certains acteurs du terrain.
Enfin, des freins politiques et des désaccords entre l’État et les régions concernées par de grands projets d'infrastructure créent des tensions supplémentaires. Une commission régionale de conciliation a été mise en place pour tenter de résoudre ces conflits, mais les doutes persistent quant à la faisabilité à long terme de ces mesures.

 

Quelles solutions pour l’immobilier neuf et les promoteurs ?

 

L’immobilier neuf doit s’adapter à ces nouvelles contraintes et trouver des solutions telles que la réhabilitation des friches, la densification urbaine raisonnée et le recours aux infrastructures existantes. Cela implique aussi de repenser la manière dont sont conçus les quartiers pour intégrer plus de nature en ville et améliorer la qualité de vie des habitants.
De nombreux promoteurs immobiliers prennent d'ores et déjà des mesures pour anticiper l’objectif du Zéro Artificialisation Nette. Parmi eux, Vinci Immobilier se démarque avec un engagement ambitieux : atteindre le ZAN dès 2030, soit 20 ans avant l’échéance légale fixée par la loi Climat et Résilience. Concrètement, ce promoteur s'engage à compenser chaque surface artificialisée par une désartificialisation équivalente ailleurs en France. Un engagement sans précédent dans le secteur immobilier. 

 

Objectif zéro artificialisation chez Vinci Immobilier


Une des stratégies majeures adoptées par Vinci Immobilier pour atteindre cet objectif repose sur le recyclage urbain. Ce procédé consiste à revaloriser des friches industrielles, des bâtiments obsolètes ou des terrains vacants, souvent en milieu urbain, pour y réaliser de nouveaux projets ou réhabiliter des structures existantes. Cette approche permet non seulement d'éviter l’artificialisation de nouveaux terrains, mais également de revitaliser des zones en déclin. Un exemple emblématique de cette stratégie a été la transformation de l’ancien stade du Ray à Nice en un nouveau quartier urbain. Cet espace, autrefois dédié au sport, a été réhabilité pour accueillir des logements et des espaces verts, tout en réduisant l'empreinte environnementale du projet.

Depuis 2019, Vinci Immobilier et Brownfields réhabilitent aussi 50 anciens terrains industriels Engie, totalisant 358 000 m², dans une démarche de recyclage urbain. Ce projet, réparti dans plusieurs villes françaises comme Armentières et Brest, vise à créer plus de 2 100 logements neufs d'ici 2030. En quatre ans, environ 17 hectares ont déjà été dépollués, permettant de revitaliser des quartiers tout en limitant l'urbanisation excessive. Cela a déjà permis de livrer une résidence intergénérationnelle à Fécamp en 2023 et de monter une douzaine de nouveaux projets résidentiels comme des résidences seniors, étudiantes et de coliving. Vinci Immobilier prévoit de réaliser plus de la moitié de son chiffre d'affaires avant 2030 grâce à des projets de recyclage urbain.

 

Partenariat avec le groupe Carrefour pour Nexity


Nexity est un autre grand nom de l'immobilier neuf qui a pris des mesures pour répondre à cet objectif fixé par le ZAN. L'entreprise met l'accent sur la réhabilitation de sites déjà urbanisés, comme des friches industrielles, pour éviter de construire sur des terres vierges. Son approche vise à réutiliser les espaces disponibles tout en intégrant des projets de haute qualité environnementale, en collaboration avec les collectivités locales. Le leader de la promotion immobilière a pour cela signé un partenariat avec le groupe Carrefour pour repenser, densifier et résidentialiser les zones commerciales en entrée de ville. Cela concerne 76 sites Carrefour en France, créant ainsi un potentiel foncier de 800 000 m². De quoi construire 12 000 logements neufs sur tout le territoire sans artificialiser.

 

Reconversion de 70 sites d'Engie pour Icade


Autre acteur engagé, Icade Promotion qui avec Brownfields et Aire Nouvelle, filiale bas carbone d'Equans France, a signé un partenariat également avec Engie pour la reconversion de 70 autres sites industriels, représentant 45 hectares répartis à travers la France métropolitaine. Ce projet de grande envergure prévoit la transformation de ces anciennes friches en programmes immobiliers mixtes, avec notamment 100 000 m² de logements neufs, ainsi que des bureaux, commerces et locaux d'activités. L'opération, visant à dépolluer et réhabiliter ces terrains, s'inscrit dans cette stratégie du Zéro Artificialisation Nette et devrait générer plus de 500 millions d'euros d'ici 2027.


En clair, l'objectif ZAN représente un tournant pour l’immobilier neuf en France. S’il s’inscrit dans une démarche de protection de l’environnement essentielle pour lutter contre la perte de biodiversité et le changement climatique, sa mise en œuvre reste complexe. Les défis techniques, financiers et sociaux sont nombreux, mais la mobilisation des différents acteurs du secteur sera déterminante pour réussir cette transition vers une urbanisation plus durable.