De « lourdes menaces » pèsent sur le marché du logement neuf en France, selon la Fédération des Promoteurs Immobiliers, qui publiait ce jeudi les chiffres post-confinement de la promotion immobilière. Des promoteurs qui s’attendent à des mois très difficiles.
« La catastrophe est devant nous », c’est ainsi qu’Alexandra François-Cuxac, présidente de la FPI, Fédération des Promoteurs Immobiliers, a résumé la conjoncture du secteur du neuf en France au terme du deuxième trimestre 2020. Si, bien sûr, le confinement et la crise sanitaire n’ont rien arrangé, le recul quasi-historique des ventes, des mises en vente, de l’offre est un effet latent engagé depuis 2018. Phénomène de non-renouvellement de l’offre à propos duquel les promoteurs alertaient depuis de longs mois. « Le Covid ne doit pas cacher le mouvement de fond, les chiffres s’enlisent depuis des trimestres », prévient Alexandra François-Cuxac.
Moitié moins de ventes de logements neufs aux particuliers
Pour preuve, si les ventes reculent de 37,8 % à 25 000 logements neufs vendus au deuxième trimestre, elles diminuent de presque 32 % au premier semestre 2020 avec 54 190 ventes en six mois. Ce qui inquiète surtout, ce sont les ventes aux particuliers, qui faute d’offre, ont baissé de moitié sur trois mois, le niveau le plus bas enregistré depuis 2012. Un recul compensé par les ventes en bloc : + 39 %. Le plan de la CDC Habitat se portant acquéreur de 40 000 logements y est pour beaucoup ; mais pas seulement, c’est une tendance, positive cette fois, depuis trois trimestres. « L’investissement résidentiel apparaît comme moins instable », précise Marc Villand, vice-président de la FPI. Reste que chez les particuliers, l’investissement locatif reste désormais minoritaire comme depuis plusieurs trimestres.
Deux fois moins de mises en vente de logements neufs
12 ans que l’on n’avait pas vu cela : les mises en vente au deuxième trimestre ne dépassent pas les 17 000 lots commercialisés. Un retour au quasi-niveau du quatrième trimestre 2008 en pleine crise des subprimes. Le recul trimestriel est de 53,8 %, quand le recul semestriel est de 46,7 %, c’est-à-dire moitié moins qu’il y a un an. Ce phénomène affecte toutes les grandes métropoles : - 62 % à Toulouse, - 72 % en Ile-de-France. Dans la métropole de Lyon, c’est même la troisième année consécutive de baisse.
La FPI de rappeler que c’est en partie en raison du Covid et du confinement mais aussi des élections municipales. Quand traditionnellement, la tenue des élections municipales limite d’un quart la production de logements neufs, cela dépasse les 42 % cette année. Ce qui joue sur l’offre disponible : - 15,5 % et moins de 100 000 logements neufs en commercialisation. On passe sous les 9 mois de stock à Angers : 5,4 mois, en Ile-de-France : 7,5 mois ou encore à Strasbourg : 8,6 mois et « cela malgré l’effondrement des ventes durant le confinement ».
Tension sur les prix des appartements neufs
Faute d’offre, la pression sur les prix de l’immobilier neuf s’accentue : + 3,2 % en France à 4 600 €/m², + 2,3 % en Ile-de-France. L’indice FPI, créé en 2015, montre tout de même que la hausse des prix du logement neuf reste plus raisonnable que l’augmentation enregistrée dans l’ancien.
Perspectives sombres pour l’immobilier neuf
Même si les taux d’intérêt restent bas, que les Français n’ont jamais autant épargné, « des années très sombres » s’annoncent pour le logement neuf. En rythme annuel, le nombre de permis de construire délivrés a déjà reculé de 50 000, dont au moins 30 000 dans le collectif, les mises en vente devraient donc continuer de diminuer, au moins jusqu’à mi-2021, préviennent les promoteurs. Des promoteurs inquiets du « discours de décroissance qui se répand partout et qui est extrêmement préjudiciable pour l’économie : le BTP, c’est 1 million d’emplois, 10 % du PIB, mais aussi pour l’écologie : ce sont les promoteurs qui construisent la ville du quart d’heure, dont tout le monde parle ; mais également pour la société ». Et la présidente de la FPI de s’interroger, avec
La FPI réclame notamment dès à présent une prorogation de la loi Pinel pour assurer de la visibilité aux promoteurs.
l’impression de « naviguer à contre-courant », « comment va-t-on loger les 73 millions d’habitants prévus d’ici 2030 ? », car, rappelle Alexandra François-Cuxac, la rénovation principalement soutenue dans le plan de relance, ne crée pas de logement.
Réagissant au recul également observé dans les résidences gérées, « on s’appauvrit collectivement en matière d’offre diversifiée de logements, de services, de mixité. Nous serons tous pénalisés si le gouvernement ne mobilise pas les forces-vives de notre pays, c’est-à-dire les maires qui ont les clés de l’urbanisme entre les mains, pour soutenir le logement neuf qui va mettre des années à s’en remettre, sans compter les conséquences économiques et sociales sur la population », analyse la présidente des promoteurs, très inquiète. « Après le plan de relance, il faudra très rapidement passer au plan de sauvetage si cela continue », conclut-elle, face à l’urgence à produire du logement neuf.
Une première réunion de concertation ce vendredi avec le ministère
La ministre déléguée au Logement, Emmanuelle Wargon, a d’ores et déjà annoncé une prolongation et des « améliorations » à apporter au dispositif Pinel et au PTZ, les deux principaux dispositifs de soutien à l’accession et à l’investissement locatif. Pour cela, son cabinet engagera une première réunion confédérale de concertation ce vendredi. La FPI y participera notamment, réclamant de la visibilité dès à présent pour après 2021 pour la loi Pinel, afin « d’acter un dispositif qui fonctionne et de sécuriser les opérateurs, mais également les investisseurs particuliers ». Avec un leitmotiv pour la FPI : un discours fort des pouvoirs publics pour soutenir au logement neuf. Première étape pour relancer la production, selon les promoteurs.
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