Jean-Christophe Laurent : « Urbat mise sur le logement modulable pour répondre aux modes de vie des clients »
Président d’Urbat, Jean-Christophe Laurent nous présente le nouveau concept lancé par ce promoteur immobilier présent dans la moitié sud de la France. Concept de logement qui s'adapte aux évolutions des modes de vie et aux attentes changeantes des ménages, en proposant des solutions innovantes et flexibles pour l'habitat de demain.
- Comment s'est déroulée votre année 2023 et quel est votre ressenti sur ce début d'année ?
« 2023 a été une année particulièrement ardue pour nous, à l'image de ce que le secteur immobilier dans son ensemble a pu connaître. Nos performances commerciales se sont inscrites dans la même tendance que celles de nos confrères, ni meilleures ni moins bonnes, en subissant une baisse significative. Plus précisément, nous avons enregistré des réductions de l'ordre de 30 à 35 %, que cela concerne les réservations, les ventes ou le lancement de nouveaux projets. Cette situation résulte d'un ensemble de facteurs déjà bien identifiés, à savoir un climat géopolitique instable ayant entraîné une hausse des coûts des matières premières et de l'énergie, le tout exacerbé par une inflation soutenue qui a fait grimper les taux d'intérêt. Nous nous sommes retrouvés face à un véritable dilemme, nos clients ayant de plus en plus de mal à accéder à la propriété. Ce phénomène n'a pas épargné Urbat et s'est avéré général dans le secteur immobilier, y compris pour l'immobilier ancien qui a également beaucoup souffert.
Quant à l'amorce de 2024, elle nous a permis de tirer certaines leçons de l'année précédente, notamment le fait que le monde a changé. Cette prise de conscience nous a rendus plus vigilants et mieux préparés à faire face aux défis actuels. Concernant l'inflation, bien qu'elle ne se soit pas complètement estompée, nous avons assisté à un ralentissement de sa progression, ce qui a légèrement favorisé un apaisement des taux d'intérêt. Ces derniers n'ont pas encore nettement diminué, mais nous avons noté des signes de baisse en ce début d'année. Un changement notable concerne également l'attitude des banques : après avoir fortement restreint l'accès au crédit en 2023, elles commencent désormais à assouplir leurs conditions. »
- Cela se ressent-il dans vos interactions avec les potentiels acheteurs dans les bulles de vente ?
« Nous observons un niveau de contact satisfaisant, mais le principal obstacle reste la conversion de ces contacts en ventes. Nos prospects expriment une certaine réticence et une inquiétude à l'idée de s'engager financièrement. Bien que les conditions d'accès au crédit s'améliorent sur le papier, nos clients rencontrent encore des difficultés à obtenir des plans de financement adaptés auprès de leurs banques. Ainsi, même si la situation semble s'assouplir, nous n'avons pas encore constaté d'impact direct sur nos ventes. Ces signes d'amélioration sont des indicateurs que nous suivons attentivement. »
- Malgré les défis imposés par la crise actuelle, Urbat a pris la décision audacieuse d'innover avec un nouveau concept. Quelle a été la motivation derrière cette démarche ?
« Face à une crise, il existe de nombreuses stratégies pour s'en sortir. Ce qu'il faut éviter à tout prix, c'est de rester passif et de se résigner. Les périodes de turbulence nous obligent à nous interroger et à nous réinventer. C'est exactement ce que nous avons fait chez Urbat au cours des deux dernières années. Le concept que nous présentons aujourd'hui est le résultat d'un effort soutenu, où nous avons entièrement repensé notre approche du développement technique, commercial, marketing, et produit. Cela a été un véritable changement de paradigme pour nous, impliquant tous les collaborateurs de l'entreprise. Après deux ans d'efforts intensifs, notre concept est le fruit de cette dynamique collective, élaboré avec l'agence de design Outside, qui a contribué à cette grande révolution interne. Un concept qui repose concrètement sur une approche architecturale innovante. Traditionnellement, nos logements sont contraints par la présence de murs porteurs, indispensables à la structure de l'immeuble mais limitant les possibilités d'aménagement.
Notre nouveau concept s'affranchit de cette contrainte grâce à l'utilisation du système poteau-poutre, couramment employé dans la construction de bâtiments fonctionnels tels que les bureaux. Ce procédé constructif permet de reposer la structure sur des poteaux situés en périphérie du bâtiment, libérant ainsi l'espace intérieur pour un aménagement flexible, uniquement composé de cloisons non porteuses. L'exemple que nous donnons souvent est celui d'un appartement de type T3, d'une surface habituelle de 65 m². Une typologie pour laquelle nous proposons plusieurs plans alternatifs qui reflètent les aspirations de nos clients. Exemple avec le plan « Une cuisine de chef » qui invite à la convivialité, avec une plus grande place accordée à la cuisine et à l'espace de vie, tout en conservant deux chambres. Ces plans sont proposés dès la commercialisation de l'opération, pour offrir à nos clients la liberté d'adapter leur logement à leur mode de vie. »
- Concrètement, votre nouvelle approche propose différents agencements pour un même logement. Cela part-il du constat que le format traditionnel du T3 ne répond pas aux attentes de tous vos clients ?
« Effectivement, nous avons observé que le schéma classique d'un appartement avec deux chambres de 12 m² ne convenait pas à tous. Beaucoup de nos clients nous ont fait part de leur désir pour des espaces de vie plus adaptés à leurs habitudes quotidiennes. Par exemple, certains privilégient une grande cuisine, reflet de leur passion pour la cuisine et l'hospitalité, au détriment de l'espace consacré aux chambres. C'est dans cette optique que nous avons repensé nos logements, en privilégiant la flexibilité et l'adaptabilité des espaces.
Prenez la « chambre évolutive », pensée pour s'adapter à l'évolution de la famille. Initialement conçue comme une grande chambre d'enfant offrant à la fois un espace de sommeil et de jeu, elle peut être divisée en deux à l'arrivée d'un second enfant grâce à une cloison amovible. Cela permet de créer deux espaces distincts la nuit, tout en conservant un grand espace ouvert en journée.
Un autre exemple est la « pièce en plus », qui peut servir de bureau pour ceux travaillant à domicile, un besoin devenu évident lors du confinement. Cette pièce peut également devenir la chambre d'un adolescent cherchant plus d'indépendance ou accueillir des invités. Ces innovations répondent à un désir de modularité exprimé par nos clients, leur permettant de personnaliser leur espace de vie selon leurs besoins et envies. »
- Au-delà de la modularité des pièces, sur quels autres aspects avez-vous travaillé ?
« Nous avons aussi repensé l'utilisation de l'espace en termes de volume plutôt qu'en surface pure. Par exemple, nous avons conçu des solutions de rangement innovantes, comme des placards descendus du plafond ou exploitant les hauteurs sous plafond dans l’entrée, des espaces jusqu'alors peu utilisés dans les logements traditionnels.
Nous avons aussi mis l'accent sur l'importance des espaces extérieurs en créant des « terrasses augmentées » avec des possibilités de rangement, de travail ou de détente, transformant ainsi l'extérieur en une véritable extension de l'espace de vie. Nous veillons à ce qu'au moins 50 % de nos logements bénéficient d'une double orientation, optimisant ainsi la lumière naturelle et le bien-être des occupants, même si garantir 100 % de logements bi-orientés n'est pas toujours faisable. »
- Quels sont les premiers retours de votre clientèle sur ce nouveau concept de logement modulable ?
« À ce jour, les logements intégrant pleinement notre nouveau concept n'ont pas encore été construits physiquement. Tous les permis de construire déposés depuis le début de l'année 2023 intègrent cette nouvelle approche. En 2023, nous avons ainsi déposé 17 permis pour nos résidences, toutes prévues pour incorporer ce concept.
D’autant que l'une des caractéristiques clés de ce concept est la réversibilité et la flexibilité qu'il offre aussi sur le long terme. Grâce à l'approche poteau-poutre, les propriétaires pourront, même après une décennie, réaménager leur espace selon l'évolution de leurs besoins familiaux ou personnels. Par exemple, un client ayant acquis un logement en 2024 et le recevant en 2025 pourra, si un enfant quitte le foyer pour ses études, reconfigurer l'espace pour s'adapter à cette nouvelle situation. Cette capacité d'adaptation à long terme représente une véritable innovation dans le secteur immobilier, avec une valeur ajoutée significative aux propriétaires. »
- Où sera situé le premier programme neuf développant ce concept ? Et en quoi, il sera symbolique ?
« La première opération commerciale intégrant à 100 % notre concept est prévue à Idron, près de Pau, avec une commercialisation qui débutera dans quelques jours. Elle est particulièrement significative pour nous puisqu'elle intègre tous les éléments de notre nouveau concept de logement. Avec 70 logements, c'est un projet d'envergure qui sera révélateur de l'accueil réservé à notre concept, notamment parce qu'il cible principalement des primo-accédants sur un marché secondaire. Nous devons donc proposer des prix adaptés aux réalités économiques de ces villes moyennes. C'est un véritable test pour nous, bien que la conjoncture actuelle puisse influencer son impact. Néanmoins, nous attendons avec impatience les premiers retours des clients lorsqu'ils découvriront les quatre plans différents que nous proposons. »
- Concernant le prix, comment assurez-vous que ces innovations ne se traduisent pas par une augmentation pour l'acheteur ?
« Le système poteau-poutre, qui est au cœur de notre concept, ne coûte pas plus cher que les méthodes de construction traditionnelles. Nous avons mené un important travail de recherche et développement pour s'assurer que ces innovations restent économiquement viables. Mis à part quelques options spécifiques comme les placards encastrés dans l'entrée ou des aménagements spéciaux pour les balcons, qui resteront des options à prix raisonnables, le reste des innovations sera inclus dans le prix de base du logement. Nous sommes conscients des difficultés rencontrées par nos clients, notamment dans le contexte actuel où l'accès au Prêt à Taux Zéro, PTZ, est restreint à certaines zones, excluant les zones détendues dans l’immobilier neuf. C'est pourquoi nous mettons en place une démarche d'accompagnement personnalisé pour aider nos clients à naviguer dans le paysage complexe du financement immobilier. Nous avons identifié que de nombreux locataires dans le logement social, environ 30 à 40 %, ont le potentiel financier d'acquérir leur propre logement, mais sont souvent découragés par les obstacles perçus. Notre mission est de les accompagner dans ce processus, en révélant leur potentiel d'acquéreur et en les aidant à accéder à diverses aides financières méconnues, comme les prêts bonifiés, le 1 % logement ou les subventions locales. Nous avons répertorié toutes ces astuces pour conforter le financement immobilier de nos clients. Il s’agit de les soutenir et les accompagner dans une démarche patrimoniale. C’est une mission compliquée et qui prend du temps mais, c'est passionnant et il faut en passer par là pour soutenir notre activité. »