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L'auto-promotion, une solution novatrice pour la crise du logement

Des projets résidentiels durables pourraient prendre forme grâce à l'autopromotion, pour répondre à l'actuelle crise du logement neuf.

Tags : Construction, logement neuf, auto-promotion, maison neuve, Bimby


Que des particuliers fassent construire du logement neuf dans le jardin de leur pavillon, voilà une des pistes évoquées par le Premier ministre Gabriel Attal pour relancer la production. Mais comment parvenir à cette densification douce ? Eléments de réponses avec le think tank Terra Nova.



Le Bimby, acronyme de « Build In My BackYard » : construire dans mon jardin, a fait son retour dans les propos du Premier ministre, Gabriel Attal, qui souhaite remettre en avant l'importance du pavillon dans le paysage français. Alors que les zones pavillonnaires étaient souvent considérées comme un obstacle à la transition écologique, elles pourraient finalement être la clé pour répondre au manque de foncier. Pour cela, le think tank progressiste, Terra Nova, a mis en lumière le potentiel de l'auto-promotion pour développer ce potentiel foncier, une initiative portée par les habitants eux-mêmes. Explications.

 

L’auto-promotion pour favoriser la densification douce

 

Dans un article précédent publié en mars 2022 dans La Grande Conversation par Terra Nova, l'urbaniste Lily Munson, également secrétaire générale de Villes Vivantes, explorait le potentiel du périurbain français face aux défis du Zéro Artificialisation Nette, ZAN et à une crise du logement alors sous-estimée. Deux ans plus tard, face à une crise encore plus profonde, des ventes de maisons individuelles divisées par deux en deux ans notamment, elle revient sur ses propositions initiales, ajustant sa vision à la lumière de son expérience au sein de Villes Vivantes, start up d’urbanisme qui collabore avec des collectivités pionnières pour des projets de densification douce à travers la France.
Initialement, l'idée d'une « micro-promotion » était évoquée, encadrée par un statut spécifique et soutenue par des financements dédiés. Cependant, après une réévaluation approfondie, Lily Munson défend désormais l'auto-promotion à l'échelle des « petits propriétaires de banlieue ». Des milliers d'opérations en auto-promotion ont déjà été réalisées avec succès en France, révélant le potentiel de cette approche.

Contrôler mais aussi alléger les PLU pour permettre le Bimby et favoriser la densification du tissu pavillonnaire, voilà les pistes envisagées.
L'urbaniste insiste donc sur la nécessité de transcender la simple densification pavillonnaire pour adopter une approche globale de « densification douce », englobant tous les espaces résidentiels. Cette vision a récemment été discutée lors du colloque Organic Cities, où des experts du monde entier ont partagé des expériences de production de logements « bottom-up », qui part du terrain, dans des métropoles telles que Tokyo, Jakarta, Toronto et la côte ouest des États-Unis. Les habitants, soutenus par des outils innovants et des règlements adaptés, peuvent alors jouer un rôle essentiel dans la production de logements abordables.
La crise actuelle du logement, avec 330 000 personnes sans abri et une augmentation des prix de construction liée à divers facteurs, comme la nouvelle réglementation environnementale, RE 2020, nécessite des solutions audacieuses. Les impacts à long terme sur le plan social, économique et des compétences sont considérables ; mais comment le gouvernement peut-il aider la densification douce à passer à l'échelle ?

 

Comment développer l'auto-promotion et la construction de maisons dans les jardins ?

 

Pour favoriser la densification douce à l'échelle nationale, le gouvernement doit mettre en place des politiques publiques innovantes qui reconnaissent et soutiennent la filière de l'auto-promotion. Actuellement, l'auto-promotion représente une part significative de la production annuelle de logements en France, mais elle se caractérise souvent par un étalement urbain. L'idée est de rediriger cette filière vers la densification des quartiers existants en facilitant la construction sur des terrains issus du partage de parcelles déjà bâties. Cela nécessite un accompagnement spécifique, car les particuliers auto-promoteurs n’ont pas l’habitude de déléguer la maîtrise d'ouvrage à des acteurs professionnels. Le gouvernement peut jouer un rôle en adaptant les politiques existantes pour tenir compte de la nature individualisée et miniaturisable de ces projets. Cela implique de repenser les normes environnementales, le code de la construction, les règles d'urbanisme, les plans de prévention des risques et autres régulations qui peuvent entraver la flexibilité nécessaire à la densification douce. Voici cinq solutions pour y parvenir, selon l’urbaniste repris par Terra Nova :
- Contrôle précis des Plans Locaux d'Urbanisme, PLU : les règlements des PLU subissent des pressions croissantes des riverains, limitant souvent les possibilités de densification. Un contrôle plus précis de ces règlements, en accord avec les objectifs du Zéro Artificialisation Nette, est essentiel pour autoriser massivement la densification douce.
- Dérogations ciblées : permettre aux petits projets d'auto-promotion de déroger à certaines règles contraignantes du PLU, comme le stationnement, l'emprise au sol sur les petites parcelles, l'accès et les possibilités d'implantation en limite séparative et à l'alignement de la voie.
- Allègement des procédures d'autorisation d'urbanisme : simplifier et ajuster certaines procédures d'autorisation d'urbanisme pour les projets d'ajout d'un logement supplémentaire sur un terrain déjà bâti, facilitant ainsi la mise en œuvre de la densification douce.
- Révision de la fiscalité locale : soutenir les maires intensificateurs en révisant la fiscalité locale, afin de donner les moyens d'équiper et d'aménager leur territoire pour accueillir de nouveaux habitants dans des conditions optimales.
- Promotion positive de la densification douce : redonner un élan positif en faveur de la densification douce en mettant en place des campagnes de sensibilisation et en soulignant les avantages, notamment la création de logements supplémentaires avec jardins, répondant aux besoins des territoires en pénurie de logements.
Dans l'optique de mettre en œuvre ces solutions, une collaboration étroite entre le gouvernement, les collectivités locales et les acteurs du secteur immobilier serait alors indispensable. Il s'agit de créer un environnement propice, encourageant les initiatives locales, tout en assouplissant les réglementations nécessaires pour favoriser une densification douce et adaptée aux besoins spécifiques de chaque territoire. Un dialogue ouvert et continu entre toutes les parties prenantes permettra de construire une vision commune et de surmonter les obstacles qui entravent actuellement le déploiement efficace de cette approche novatrice. En soutenant activement cette transition, le gouvernement contribuera à répondre à la crise du logement, tout en encourageant des pratiques de construction plus durables et abordables, conclut Lily Munson.