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Laetitia Vidal, FPI Occitanie Toulouse : « Acheteurs, ne vous censurez pas ! »

Nouvelle présidente de la FPI Occitanie Toulouse, Laetitia Vidal représente près de 45 promoteurs immobiliers de Toulouse et son aire urbaine.

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Nouvelle présidente de la FPI Occitanie Toulouse, Laetitia Vidal, également à la tête de l'entreprise Pierre Passion, revient sur les difficultés du moment sur le marché de l'immobilier neuf à Toulouse et sa région ; mais aussi sur les perspectives prometteuses pour les acquéreurs grâce au changement de zonage de la ville rose.



- Avec votre casquette Pierre Passion, membre du réseau Procivis, vous avez une orientation plus sociale, pourquoi pensez-vous qu'il est important de considérer une perspective plus globale sur le logement neuf même à la tête de la FPI Occitanie Toulouse ?

 

« Je privilégie le dialogue avant tout. Tous les acteurs du bâtiment ont compris que notre avenir repose sur la solidarité. Cela se manifeste par l’Alliance pour le logement, une initiative sans précédent où tous les acteurs s’unissent pour s’adresser au gouvernement. J'ai toujours cru en cette union, et aujourd'hui plus que jamais, je suis convaincue que l'union fait la force. Le secteur du logement social n’est pas opposé à celui du logement privé ; ils sont complémentaires et indissociables. D’autant que la crise nous oblige à nous unir encore plus. Le logement, dans son ensemble, doit être repensé car nous faisons face à une crise sociale majeure. Malheureusement, le gouvernement n'a pas encore pris conscience de cette situation. »


- La région toulousaine est souvent décrite comme le berceau de l’investissement locatif. Comment expliquez-vous le tel ralentissement actuel alors que l’on parle d’un recul des réservations de presque 60 % en 2023 ? 


« Historiquement, Toulouse a toujours été un lieu privilégié pour les investisseurs, ce qui contribuait à l'équilibre du marché. Toutefois, la perspective de la suppression de la loi Pinel a freiné cette dynamique. Sans ces investisseurs, la pénurie s'organise, exacerbée par le manque de permis de construire et les difficultés économiques. Les investisseurs jouent un rôle primordial dans la pré-commercialisation des opérations, permettant leur lancement. Aujourd'hui, sans eux, nous ne pouvons même plus répondre à la demande de logement social ni à celle des propriétaires occupants. »

 

- Quel est le premier dossier sur votre bureau de présidente des promoteurs toulousains ?

 

« Mon premier dossier est la mise en place de l'Alliance pour le logement au niveau régional. J'ai déjà entamé des discussions avec la FPI Occitanie-Méditerranée, notamment à Montpellier, et nous nous rencontrerons officiellement le 1er mai pour poursuivre ces échanges. En avril, lors du premier Conseil Croissance et Territoire, nous initierons le dialogue sur l'adaptation locale de cette alliance.
Nous avons un rôle complémentaire à celui des instances nationales. Nous pouvons aborder des problématiques spécifiques à notre région qui méritent d'être portées à l'attention plus large, notamment les défis uniques auxquels Toulouse est confrontée, exacerbés par la fin prochaine de dispositifs comme la loi Pinel. Exemple à Toulouse, qui a historiquement profité de la fiscalisation pour dynamiser son marché, nous sommes particulièrement impactés. Nous sommes en mesure de proposer des alternatives légitimes au gouvernement, comme envisager un statut de bailleur privé pour pallier la fin du Pinel. »

 

- Autre point de votre mandat, mieux collaborer avec les aménageurs publics locaux tels qu’Oppidea. Quelle est votre vision pour ces échanges ?

 

« Ma idée consiste à renforcer notre dialogue avec les aménageurs publics, surtout en dehors des périodes de concours. Ces interactions, souvent perçues comme trop compétitives, doivent évoluer vers des échanges plus constructifs et apaisés. Nous dépendons fortement les uns des autres : sans aménageurs, nous perdons une part significative de notre production, et sans promoteurs, les aménageurs ne peuvent vendre efficacement leurs terrains. Nous devons trouver un nouvel équilibre dans nos opérations. Les exigences environnementales et autres peuvent parfois pousser les promoteurs à leurs limites. Il va falloir avoir un dialogue transparent avec les aménageurs sur les difficultés actuelles des promoteurs pour ne pas compromettre la viabilité financière des projets. Un projet non viable financièrement est une perte pour tous. Nous devons donc être ambitieux tout en restant réalistes quant à nos capacités. »

 

- Vous représentez plus de 40 promoteurs en Occitanie-Toulouse. Comment se portent vos adhérents actuellement ?

 

Toulouse a été surclassée en zone A mais pas le reste de la première couronne de la ville rose. La zonage, un des dossiers de la nouvelle présidente. © Fotolia
« À l'instant T, nous gérons encore des programmes que nous avions commercialisés il y a un ou deux ans. J'aime comparer notre situation à celle des étoiles dans le ciel : tout comme la lumière d'une étoile qui est parvenue jusqu'à nous depuis des millions d'années, les grues que vous voyez aujourd'hui représentent des projets initiés il y a plusieurs années. Ce délai entre l'obtention des permis de construire et la finalisation des projets s'allonge constamment. Autrefois, un projet prenait deux à deux ans et demi à se concrétiser ; aujourd'hui, cela peut prendre jusqu'à cinq ans.
Notre principale préoccupation est donc sur le retard accumulé dans l'obtention des permis de construire pour 2022-2023, qui se traduira par une réduction du nombre de logements disponibles à la vente ou à la location dans les années à venir. Nous essayons d’alerter le gouvernement à cette situation, car la relance de nos activités ne peut se faire instantanément. Nous sommes en train de casser une partie de la machine industrielle, de la promotion immobilière et du bâtiment, nous perdons des compétences précieuses en raison des réductions d'effectifs, ce qui compliquera encore davantage la reprise. »

 

- Les élus locaux sont-ils conscients de la situation ?

 

« La prise de conscience des collectivités varie énormément. À Toulouse, par exemple, certains élus, comme Jean-Luc Moudenc, reconnaissent que la ville la plus dynamique de France en termes de démographie, un des fleurons de l'industrie française à travers l'aérospatiale, pourrait bientôt faire face à une crise de logement sans précédent. Néanmoins, les chiffres montrent que bien que Toulouse ait délivré 5 000 permis de construire ces deux dernières années, la situation est catastrophique dans la première couronne, où certains maires refusent même de rencontrer les promoteurs. Il y a un vrai déni.

Pour ceux qui recherchent des données fiables sur la situation, je recommande d’ailleurs de consulter le site de la CERC, la cellule économique de la région Occitanie. Vous y trouverez les chiffres officiels sur les permis délivrés, année par année, commune par commune. Cela offre une transparence totale sur l'état actuel du marché ; certains chiffres sur des villes comme Blagnac sont à peine croyables. Nous espérons donc une amélioration de la collaboration entre les promoteurs et les élus pour répondre efficacement à la demande de logements. Car sans une offre adéquate, même si la demande repart, le redémarrage de l'activité ne sera pas immédiat. Il faut que nous trouvions des solutions innovantes et rapides pour pallier ce manque d'offre structurel. »

 

- Pourtant, les planètes s’alignent de nouveau pour les acquéreurs. Quel message souhaitez-vous transmettre à ces acheteurs potentiels ?

 

« C’est vrai qu’actuellement, la communication sur les défis et la crise du secteur a, malheureusement, semé des doutes chez nos clients. Cela a créé une sorte d'auto-censure chez les potentiels acheteurs qui pensent ne plus pouvoir accéder à la propriété. Cependant, la demande est toujours là, particulièrement dans le cadre de l'accession sociale à la propriété, comme en témoignent les programmes en PSLA. Mon message est clair : ne vous censurez pas. Continuez à consulter les professionnels, rencontrez les banquiers et les promoteurs, surtout dans un contexte exceptionnel de baisse des prix du neuf, une première en 20 ans sur l’aire urbaine de Toulouse, d’après notre observatoire immobilier, Observer. Même si finalement vous ne pouvez pas acheter, au moins vous aurez testé votre capacité financière. Et vous pourriez avoir une bonne surprise. 
D’autant qu’avec le passage récent de Toulouse en zone A pour le PTZ, les conditions sont bien plus favorables qu'avant. Cela impacte positivement 80 % de notre clientèle qui peut désormais envisager un achat. Cette récente modification du PTZ et le changement de zonage à Toulouse ne sont pas suffisamment relayés. Il faut que les médias et nous, les professionnels, nous mobilisions pour mieux informer le public. Ces changements sont bénéfiques et pourraient aider beaucoup plus de gens à accéder à la propriété. 
Surtout que nous travaillons activement pour que le nouveau zonage en A s'étende au-delà de Toulouse, car acheter à Toulouse, à Blagnac ou à Balma devrait être perçu de manière équivalente par les pouvoirs publics. L'objectif est donc de faire passer la première couronne toulousaine en zone A, similairement à ce qui se fait autour de Montpellier. Cela aiderait énormément à l'accession à la propriété.

Même des zones comme Saint-Sulpice, qui attirent un grand nombre de travailleurs, sont toujours classées en zone C, ce qui complique grandement l'accession à la propriété. Il faut accompagner ces dynamiques locales et revoir leur classification pour faciliter le logement des personnes travaillant dans ces zones. Nous espérons que nos efforts et nos arguments seront pris en compte par les préfets des départements et de la région en marge du changement de zonage annoncé pour cet été. La reconnaissance de ces besoins et la mise en œuvre de changements de zonage en fonction des réalités locales sont essentielles pour soutenir l'accession à la propriété et répondre aux défis du logement dans notre région. »

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