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Le BTP toujours dans une récession persistante

Ciel toujours bouché au dessus du logement neuf en France, rapporte la Fédération Française du Bâtiment. © DR

Tags : Immobilier neuf, logement neuf, BTP, FFB


Malgré quelques légers signes de reprise, la Fédération Française du Bâtiment tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme. En 2024, les mises en chantier et les permis de construire continuent de s’effondrer, les ventes reculent encore, l’emploi est toujours menacé. Le secteur réclame donc des mesures d’urgence pour inverser la tendance.



Après avoir connu 5 ministres du Logement en 4 ans et 3 mois et dans l’attente d’un super ministre du Logement en charge également de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme, de la ville… Olivier Salleron, président de la FFB, Fédération Française du Bâtiment, a tenu ce mardi sa traditionnelle conférence de presse de rentrée.

Un point de conjoncture dans un contexte où malgré des signes positifs tels que la baisse des taux d’intérêt et l’enthousiasme généré par les Jeux Olympiques de Paris, le secteur du bâtiment continue de subir une récession profonde. Le constat est clair : sans mesures immédiates, la situation ne pourra que s'aggraver en 2025, affectant directement l’emploi et la dynamique économique du pays.

 

Logement neuf : un retour au niveau des années 50

 

Les données révélées par la FFB sont sans appel. À la fin du mois de juillet 2024, les mises en chantier ont chuté de 13,4 % par rapport à la même période en 2023. Ce chiffre place le nombre de nouvelles constructions à des niveaux historiquement bas, comparables à ceux des années 1950, avec une prévision d’environ 260 000 logements pour l’année. Le recul des permis de construire, à - 9,9 % sur la même période, ne laisse pas non plus, entrevoir d’amélioration à court terme.
Les ventes de logements neufs par les promoteurs ne sont pas en reste. Sur le premier semestre 2024, elles ont stagné à un niveau extrêmement bas, avec une quasi-stabilisation à - 0,9 % en glissement annuel. Toutefois, cette apparente accalmie cache de fortes disparités entre les ventes à particuliers et celles aux investisseurs institutionnels. Les ventes à particuliers continuent de s’effondrer, avec une chute de 19,2 % sur les six premiers mois de l'année, par rapport à la même période en 2023. Le nombre total de logements vendus à des particuliers a ainsi atteint seulement 29 985 unités, ce qui représente le deuxième pire résultat pour un premier semestre depuis 1995, avec un taux d’annulation toujours élevé à 16,9 %, malgré une baisse par rapport au pic de fin 2023.
À l’opposé, les ventes aux investisseurs institutionnels ont connu une hausse notable de 42,5 % au cours du premier semestre 2024, principalement grâce aux opérations de rachat du stock des promoteurs par Action Logement et CDC Habitat. Ces deux acteurs publics ont fortement soutenu le marché, avec une augmentation de 49,5 % des ventes aux bailleurs sociaux et une hausse plus modeste de 9,7 % aux autres investisseurs institutionnels. Ces hausses reposent toutefois sur des mesures exceptionnelles de soutien et ne reflètent pas une tendance de fond solide sur le marché.
Du côté des constructeurs de maisons individuelles, le constat est également inquiétant. Entre janvier et juillet 2024, les ventes aux particuliers sans intermédiaires ont plongé de 23,7 % en glissement annuel. Ce recul marque un nouveau point bas pour le secteur, avec seulement 49 300 maisons vendues en cumul sur les 12 mois précédant juillet 2024, le chiffre le plus bas depuis 2007. A noter qu’un ralentissement de la chute a été observé de mai à juillet 2024, avec un recul moins marqué de 13,1 %, et même une légère hausse en juillet : + 0,1 %. Ces chiffres laissent entrevoir que le point bas pourrait être atteint pour les maisons individuelles.
Enfin, du côté de l’offre nouvelle, les mises en vente aux particuliers ont dégringolé de presque 40 % au premier semestre 2024, plus faible niveau observé depuis 1995, avec seulement 27 200 logements mis sur le marché. Ce constat, particulièrement alarmant, montre que l'offre de logements neufs s'effondre et que les perspectives pour la fin de l'année restent pessimistes, avec des intentions de mise en chantier par les promoteurs toujours à des niveaux historiquement bas, selon l'Insee.

 

Légère amélioration dans le non résidentiel neuf

 

En parallèle, le secteur du non résidentiel neuf montre, lui, des signes davantage encourageants en 2024, avec une baisse limitée des surfaces mises en chantier : - 6,9 % à fin juillet, notamment grâce à une reprise des bâtiments publics, liée aux préparatifs des municipales de 2026. Les locaux industriels et commerciaux stabilisent également.
Cette reprise partielle ne compense pas la baisse globale de l'activité du bâtiment, avec un recul de 4,3 % au premier semestre 2024. La rénovation énergétique progresse faiblement : + 0,4 %, freinée par la réforme de MaPrimeRénov’, tandis que l'amélioration-entretien n’enregistre qu'une hausse modeste : + 1,1 %.
Malgré ces difficultés, les entreprises du BTP résistent, bien que fragilisées par des tensions de trésorerie et une hausse des défaillances : + 30 %. Côté emploi, environ 28 000 postes ont été supprimés entre les premiers semestres 2023 et 2024, et jusqu’à 60 000 pertes sont anticipées d’ici fin 2024.

 

Les leviers de la FFB pour sortir de la crise

 

Face à cette crise qui perdure, la FFB appelle, de nouveau, à la mise en place urgente d’un plan logement ambitieux : « une unanimité pour un plan logement », comme l’appelle Olivier Salleron. Malgré quelques signaux positifs, comme la baisse de l’inflation sur les matériaux et la diminution des taux d’intérêt, ces éléments seuls ne suffiront pas à redresser un secteur en souffrance. En effet, la baisse des taux, bien qu’encourageante, ne permet pas à tous les acteurs de revenir sur le marché, notamment en raison du manque d’apport personnel ou de fonds propres.
Pour répondre à ces difficultés, la FFB réclame au futur gouvernement et aux parlementaires, la mise en place sans attendre de quatre mesures phares :
- Rétablissement d’un Prêt à Taux Zéro universel ou au moins un prêt à taux réduit avec de longs différés de remboursement, afin de stimuler l'accès à la propriété.
- Prorogation de la loi Pinel jusqu'à ce qu'un autre dispositif plus adapté soit élaboré. Le mécanisme Pinel reste, malgré tout, reconnu pour ses bénéfices, y compris par la Cour des comptes. Lire également - Un Pinel controversé mais structurant selon la Cour des comptes
- Maintien des aides à la rénovation énergétique telles que MaPrimeRénov’, qui doit continuer d’être un levier essentiel pour atteindre les objectifs climatiques du pays.
- Arrêt de la surenchère réglementaire, notamment en décalant de trois ans le prochain seuil de la RE2020, jugée trop contraignante dans le contexte actuel.
Objectif : créer un coup de pouce immédiat au secteur, en réponse à la crise qui perdure. La FFB appelle le gouvernement à intégrer ces propositions dans le Projet de Loi de Finances 2025, afin de redonner une dynamique positive au secteur du logement.
En effet, les légers signaux de reprise ne doivent pas masquer la gravité de la situation, marquée par une baisse continue des mises en chantier et des permis de construire. Si la résilience des entreprises est à souligner, les tensions sur l'emploi et l'activité appellent à une réaction forte et rapide des pouvoirs publics, martèle la FFB. L’instance représentative du bâtiment plaide pour un plan logement ambitieux, dont la mise en œuvre est indispensable pour relancer un secteur vital pour l'économie française et le bien-être social.