Immobilier neuf : reprise timide en 2025 dans un contexte de crise structurelle
En pleine crise structurelle, l’immobilier neuf en France subit une chute historique des constructions. Malgré des signaux positifs pour 2025, la reprise s’annonce timide et inégale, portée tout de même par des taux d’intérêt en baisse et un regain d’intérêt des ménages.
Face à un niveau de constructions digne des années 1950, le marché de l’immobilier neuf en France traverse une période profondément marquée par une crise structurelle et des transitions majeures. Les chiffres évoqués par Alain Tourdjman lors de la conférence de presse de l’Observatoire BPCE, confirment une situation alarmante mais ouvrent également une fenêtre d’espoir pour les années à venir.
Un secteur du logement neuf en difficulté historique
La construction de logements neufs est à son plus bas niveau depuis les années 1950, avec des mises en chantier s’établissant à 260 000 unités pour 2025, après un creux record de 250 000 en 2024. « Nous revenons à un niveau de production que nous n’avions pas vu depuis 1956-1957 », souligne Alain Tourdjman. Cette baisse s’explique par des coûts de construction en hausse, une réglementation plus stricte et une pression accrue liée aux objectifs environnementaux tels que le Zéro Artificialisation Nette, ZAN.
Le secteur des maisons individuelles est particulièrement sinistré, avec seulement 70 000 mises en chantier prévues pour 2025. « La reprise restera très fragile », commente l’économiste de BPCE, évoquant des contraintes sévères sur l’accès au foncier, les résistances des collectivités et la disparition de nombreux constructeurs.
Les promoteurs immobiliers face à de nouvelles contraintes
La promotion immobilière, également en crise, peinera à trouver un équilibre en 2025 après l’arrêt du dispositif Pinel, qui soutenait l’investissement locatif. Les ventes aux particuliers devraient légèrement progresser, passant de 65 000 en 2024 à 70 000 en 2025, grâce à une baisse des prix observée dans certaines zones, notamment la zone Abis comme dans le Grand Paris. Toutefois, les incertitudes liées aux délais de livraison et au coût des projets freinent une véritable relance.
Un regain d’intérêt des ménages pour l’immobilier
Malgré ce contexte difficile, certains signes positifs émergent. Les enquêtes de BPCE montrent un net rebond des projets d’achat depuis juin 2024, en particulier pour les ménages investisseurs patrimoniaux et la tranche des 30-49 ans. Ces derniers sont encouragés par la baisse des taux d’intérêt, qui sont passés de 3,87 % en septembre 2023 à 3,44 % en novembre 2024. Ce léger desserrement des conditions de crédit, combiné à une diminution du taux d’apport moyen (de 24 % à 22 %), rend l’acquisition plus accessible.
Selon Alain Tourdjman, « la perception de la conjoncture s’améliore tant chez les acheteurs que les vendeurs ». Dans le même temps, les intentions d’investissement locatif augmentent de 7 points depuis juin, ce qui témoigne d’une confiance renouvelée dans l’immobilier comme valeur refuge.
Un marché de l’emploi et des prix en toile de fond
Le marché de l’emploi et la stabilité politique restent tout de même des préoccupations majeures pour les ménages. En effet, 83 % d’entre eux s’inquiètent d’une éventuelle hausse des impôts, ce qui pourrait freiner leurs projets d’achat. Parallèlement, les prix immobiliers amorcent une stabilisation après deux années de baisse : - 2 % attendus au T4 2024. L’économiste anticipe « une fin de l’atterrissage des prix, sans réel rebond à court terme ».
En termes géographiques, une diversification des préférences se dessine, avec un intérêt croissant pour les zones moins denses. Cet effet croisé entre qualité de vie et solvabilité pourrait transformer durablement le paysage immobilier français.
Quelles perspectives pour 2025 et au-delà ?
Si les indicateurs restent globalement prudents, un rebond modéré est envisagé à partir de 2025. Celui-ci s’appuie sur des taux d’intérêt en baisse continue : prévus à 3,20 % en moyenne pour 2025 et une légère reprise des financements. Toutefois, Alain Tourdjman insiste sur le fait que « la reprise sera en ordre dispersé, limitée par des incertitudes économiques et politiques ».
La production immobilière, bien qu’en hausse, ne suffira pas à répondre pleinement à la demande, alimentant une tension persistante sur l’offre de logements de qualité énergétique supérieure. De nouvelles stratégies, comme la modularité des constructions et l’adaptation aux usages évolutifs, deviennent nécessaires pour moderniser le modèle économique du secteur.
L’habitat neuf reste à la croisée des chemins, avec un secteur du logement « profondément bouleversé » ; mais du coup avec des opportunités de transformation. Les ajustements observés en 2024, notamment dans les politiques de crédit et les préférences des ménages, pourraient poser les bases d’un redémarrage progressif. Ce rebond nécessitera tout de même une stabilité politique et économique afin que les efforts des acteurs sécurisent une reprise durable et équitable.