François Bayrou Premier ministre : quelles perspectives pour le logement et l'immobilier neuf ?
François Bayrou à l’épreuve de Matignon : quel avenir pour le logement ? L’arrivée du maire de Pau, président du Modem, comme Premier ministre marquera-t-elle un tournant pour le logement, secteur clé en quête de stabilité, alors que la construction traverse une crise historique.
La nomination de François Bayrou au poste de Premier ministre, suite à la censure historique du gouvernement Michel Barnier le 4 décembre dernier, marque une nouvelle étape dans la gestion des dossiers clés pour le pays. À 73 ans, cet artisan du dialogue politique devra naviguer dans une Assemblée nationale fracturée, tout en répondant aux attentes d’un secteur capital pour l’économie tricolore : le logement.
Un Premier ministre sans spécialisation immobilière, mais pas sans idées ?
Bien qu’il ne soit pas reconnu comme un expert du logement ou de l’immobilier, François Bayrou a, au cours de sa carrière, esquissé des propositions ambitieuses, relevées par le Journal de l’Agence. Lors du colloque de l’UDF en 2006, il avait souligné l’importance d’assurer un accès équitable au logement. « Cet objectif du droit au logement pour les plus démunis (…) doit être un objectif national », avait-il déclaré, appelant à des mesures concrètes pour répondre aux tensions des grandes métropoles.
En 2012, dans le cadre de la présidentielle, François Bayrou avait proposé la création d’un observatoire des loyers opposables, « zone par zone », ainsi que l’instauration de préfets de la cohésion sociale et du logement. Enfin, plus récemment, en 2023, le groupe MoDem qu’il préside avait mis en avant l’idée d’une fiscalité incitative récompensant les élus facilitant l’accès au logement. Une piste de TVA immobilière réclamée de longue date par la FPI, Fédération des Promoteurs Immobiliers.
Malgré ces propositions, François Bayrou devra composer avec une Assemblée Nationale fracturée. A peine nommé, sans même encore avoir composer son gouvernement, certains chefs de file des partis politiques représentés, à l’image de LFI, ont déjà fait savoir leur intention de le censurer. Bonne nouvelle, tout de même, en tant que maire de Pau, il a mené des initiatives locales en matière de logement, reflétant un souci d’adaptation aux spécificités territoriales.
Pour autant, son arrivée à Matignon va-t-elle signifier une continuité dans les politiques engagées sous Michel Barnier. La ministre démissionnaire du Logement, Valérie Létard, pourra-t-elle conserver son poste comme de nombreux acteurs le réclament ?
Valérie Létard, un gage de stabilité dans un secteur en quête de repères ?
Valérie Létard, nommée en septembre dernier, bénéficie en effet d’un soutien notable des professionnels du secteur. Loïc Cantin, président de la Fnaim, a souligné l’importance de la stabilité ministérielle : « Quand vous avez quatre ministres en deux ans, vous ne faites rien. » Cécile Duflot, ancienne ministre du Logement, a également plaidé pour une politique de logement portée par une vision à long terme.
L’une des initiatives attendues de Valérie Létard est l’élargissement du prêt à taux zéro, PTZ à l’ensemble du territoire, y compris pour les maisons individuelles, une mesure annulée jusqu’ici avec la censure du gouvernement Barnier. Son soutien à l’exonération des droits de mutation pour les donations familiales, favorisant l’accession à la propriété, a également marqué les esprits.
Le maintien de Valérie Létard dans le futur gouvernement Bayrou pourrait permettre de consolider rapidement ces avancées et d’apporter de la visibilité à un secteur en quête de fortes et urgentes mesures de relance.
Les attentes des professionnels du bâtiment
Des mesures à l'image de celles réclamées par la Fédération Française du Bâtiment qui appelle à un ministère du Logement de plein exercice et à un projet de loi de finances reprenant des mesures clés : la généralisation du prêt à taux zéro, mais aussi la révision de la Réduction de loyer de solidarité (RLS) pour les bailleurs, le dégel des aides à la rénovation énergétique du parc social, le maintien du budget pour MaPrimRénov’ ou encore la simplification administrative avec la suppression des attestations de TVA. Olivier Salleron, président de la FFB, a souligné dans un communiqué de presse l’urgence d’agir face à la récession du secteur et exhorte le futur gouvernement à soutenir un secteur vital pour l’économie. Il appelle également à relancer les discussions sur le statut du bailleur et les règles du ZAN, Zéro Artificialisation Nette. « La FFB ne lâchera rien ! Nous repartirons au combat dès la nomination du gouvernement pour conserver les mesures que nous avions obtenues dans le budget 2025 ».
Du côté des promoteurs immobiliers, même si Pascal Boulanger, président de la FPI, souhaite bonne chance au nouveau gouvernement, il réclame également que Valérie Létard soit renconduite à son poste, dans un ministère de plein exercice afin que les travaux portés jusqu'ici par les parlementaires, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, se concrétisent le plus rapidement possible. Si l'extension du PTZ sera surtout utile au secteur de la maison, la promotion immobilière croit beaucoup en l'exonération des droits de donation et sur l'allègement des normes. « Nous serons prêts dans un second temps à travailler sur le statut du bailleur privé pour relancer notre secteur qui, malgré quelques étincelles grâce à la baisse des taux d'intérêt et l'effet d'aubaine lié à la fin du Pinel, ne connaît pas de réelle reprise. Ce ne sont que quelques petites étincelles et pas une tendance de fond », conclut le représentant des promoteurs.
D’autant que le défi du logement ne se limite pas aux enjeux sociaux. Il est aussi une question économique, alors que le BTP annonce que 10 000 emplois sont perdus chaque mois dans le secteur, que les défaillances d’entreprises se multiplient. Les bailleurs sociaux, promoteurs immobiliers mais surtout les candidats à l’accession à la propriété attendent donc tous des décisions claires notamment sur des dispositifs tels que le PTZ en 2025.
Dans ce contexte, François Bayrou pourrait bien incarner une approche pragmatique. Toutefois, la véritable mesure de son impact se jouera lors de la nomination du gouvernement et du futur ministre du Logement, et bien sûr dans le cadre de l’élaboration du budget pour 2025. A voir si le logement, souvent perçu comme un levier de justice sociale, pourra, enfin, devenir l’un des marqueurs clés du futur gouvernement Bayrou.