Effondrement des permis de construire : une crise aiguë pour l'immobilier neuf
Malgré un léger rebond d’un mois sur l’autre, les permis de construire continuent de plonger de 17,7 % en un an, mettant en lumière la crise sévère du secteur immobilier neuf en France. Entre hausse des coûts et recul des soutiens publics, les conséquences, déjà sur l’emploi, sont de plus en plus dramatiques.
Le secteur de la construction de logements neufs en France traverse une crise sans précédent. Selon les données provisoires publiées par le ministère de la Transition écologique le 30 mai 2024, le nombre de permis de construire délivrés a continué de baisser de manière drastique sur les douze mois se terminant en avril 2024. Entre mai 2023 et avril 2024, seulement 358 200 logements ont été autorisés à la construction, soit une baisse de 17,7 % par rapport à la même période l'année précédente.
Une diminution historique de la construction de logements neufs en France
Cette chute représente non seulement une baisse par rapport à l'année précédente, mais également un recul significatif de 22 % par rapport aux douze mois précédant la crise sanitaire de 2020. Les chiffres actuels marquent les niveaux les plus bas enregistrés depuis le début de la série en 2000. Ce déclin alarmant touche particulièrement les maisons individuelles, avec une réduction de 19,7 %, pour atteindre seulement 129 200 autorisations. Les logements collectifs, bien que moins touchés, connaissent aussi une baisse notable de 16,6 %, totalisant 229 000 autorisations. Les résidences spécifiques telles que les résidences étudiantes ou pour seniors ont, quant à elles, limité leur recul à 11,1 %.
Quelles régions s’en sortent le mieux ?
Certaines régions s'en sortent mieux que d'autres. Les Hauts-de-France et la Bretagne enregistrent des baisses plus modérées de respectivement 4,4 % et 8 %. À l'inverse, les régions les plus tendues et avec les plus forts volumes comme l'immobilier neuf en Ile-de-France et Provence-Alpes-Côte d'Azur ont vu leurs permis de construire chuter drastiquement, avec des baisses respectives de 21,6 % et 26,4 %. La région Centre-Val de Loire n'est pas épargnée non plus, affichant une diminution de 27 %.
Des mises en chantiers de maisons et d’appartements neufs en chute libre
Le nombre de mises en chantier, qui suit généralement la tendance des permis de construire, a également plongé. Entre mai 2023 et avril 2024, 282 400 logements ont été mis en chantier, soit une diminution de 22,3 % par rapport aux douze mois précédents. En comparaison avec les niveaux d'avant la crise sanitaire, cette baisse est de 27 %. Malgré un léger rebond en avril 2024, avec une augmentation de 9 % par rapport à mars 2024, ces chiffres restent bien en deçà des moyennes historiques.
Des causes multiples à cette baisse d’autorisations à construire…
Plusieurs facteurs contribuent à cette crise. L'augmentation des coûts de construction due à la hausse des prix des matériaux et aux normes environnementales plus strictes, combinée à la montée des taux d'intérêt, a découragé les nouveaux projets immobiliers. A cela, s’ajoute la réduction des dispositifs publics de soutien à l'immobilier neuf qui a freiné les investissements, notamment locatifs des investisseurs en loi Pinel. Ces éléments ont déjà eu des répercussions directes sur l'emploi dans le secteur. La Fédération française du bâtiment, FFB, anticipe la suppression de 90 000 emplois d'ici fin 2024, chiffre qui pourrait grimper à 150 000 d'ici la mi-2025.
… et des perspectives inquiétantes pour un secteur en détresse
Les projections pour les mois à venir ne sont guère optimistes. Les mises en chantier et les autorisations de construire continuent de montrer des signes de faiblesse. De février à avril 2024, les logements autorisés ont diminué de 4,9 % par rapport aux trois mois précédents, tandis que les mises en chantier ont affiché une légère hausse de 2,5 %. Toutefois, cette hausse des mises en chantier est en grande partie due aux logements collectifs : + 7,4 %, alors que les logements individuels continuent de baisser : - 4,1 %.
Le secteur de la construction de logements neufs est clairement en difficulté. Les promoteurs immobiliers sont contraints de revoir leurs plans, certains annonçant même des plans sociaux ou des dépôts de bilan. Les petits acteurs du marché sont particulièrement vulnérables, incapables de supporter l'augmentation des coûts et la baisse de la demande. Les défaillances dans les entreprises de promotion immobilière commencent désormais à faire la une de la presse régionale, quand les majors de la promotion annoncent des plans de sauvegarde de l'emploi.
La baisse des permis de construire et des mises en chantier affecte non seulement les promoteurs, mais aussi l'ensemble de la chaîne de valeur de la construction, des fournisseurs de matériaux aux entreprises de construction en passant par les architectes et les ingénieurs.
Face à cette crise, des mesures d'urgence s'imposent. Pourtant, le gouvernement n’envisage toujours pas de rétablir, voire d'amplifier les dispositifs de soutien à l'immobilier neuf pour relancer le secteur. Il semble pourtant impératif de trouver un équilibre entre les exigences environnementales et la viabilité économique des projets de construction pour permettre aux Français de se mieux se loger. Le secteur de l'immobilier neuf en France traverse une période de turbulences sans précédent. Une situation de plus en plus critique qui pourrait entraîner, sans réactions, un effondrement plus profond et durable.