Congrès FPI : le statut du bailleur privé annoncé suffira-t-il à inverser la crise ?
Crise persistante, espoirs naissants : au Mucem à Marseille, la FPI a débattu des voies de sortie. Entre inertie politique et innovations fiscales, à commencer par le futur statut du bailleur privé, le logement neuf cherche à retrouver des vents porteurs.

Crise persistante, espoirs naissants : au Mucem à Marseille, la FPI a débattu des voies de sortie. Entre inertie politique et innovations fiscales, à commencer par le futur statut du bailleur privé, le logement neuf cherche à retrouver des vents porteurs.
Trouvez un logement neuf en 3 clics !
Où cherchez-vous ?
- Pour habiter
- Pour investir
- Terrains
Le 53e Congrès de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), tenu au Mucem à Marseille, aura été à l'image de la situation du logement neuf en France : complexe, critique, mais non dénué d'espoir. Autour du thème « Logement neuf, vents favorables ? », la profession s'est interrogée sur sa capacité à faire tomber le point d'interrogation. Résultat : si les signaux de prise de conscience se multiplient, les moyens, eux, peinent encore à suivre. Et le salut pourrait bien venir du futur statut du bailleur privé, érigé en priorité par la FPI.
Gratuit, téléchargez notre guide
“ Acheter un logement neuf : mode d'emploi ”
- Les avantages du neuf
- Comment financer un logement neuf
- Achat en VEFA, mode d'emploi
Un cap de stabilité dans la tempête
Premier temps fort de ce congrès : la reconduction exceptionnelle de Pascal Boulanger à la tête de la FPI. Réunie en assemblée générale extraordinaire, la fédération a adopté à une quasi-unanimité une modification temporaire de ses statuts, permettant d'élire son président pour un mandat unique de cinq ans. Ce prolongement jusqu'en 2030 a été justifié par la nécessité de garantir une stabilité stratégique dans un moment politique charnière, alors que la recomposition de l'exécutif est attendue en 2027.
« À l'heure où le logement doit redevenir un sujet politique central, la FPI a fait le choix de la cohérence, de la continuité et de la lisibilité », a déclaré Pascal Boulanger. Une parenthèse statutaire exceptionnelle donc, destinée à renforcer la capacité d'influence de la profession dans les prochains arbitrages publics.
Marseille, ville témoin d'une crise nationale
Le choix de Marseille pour accueillir ce congrès ne doit rien au hasard. Territoire emblématique des tensions du logement, la cité phocéenne concentre les symptômes d'un système à bout de souffle à l'image de la hausse dramatique des demandes de logements sociaux (passées de 40 000 à 54 000 entre 2020 et 2024), inertie administrative, pression citoyenne et lourdeur des procédures. Patrick Amico, adjoint au logement, a évoqué un nécessaire « choc culturel, politique, administratif » pour sortir de l'impasse. « Produire la ville, ce n'est plus juxtaposer des opérations », a-t-il martelé. Son collègue Eric Méry a insisté sur l'importance de lier densification urbaine à l'actuel développement des transports dans les quartiers périphériques de l'est et du nord.
Même tonalité du côté de David Ytier, vice-président de la métropole Aix-Marseille-Provence, qui alerte à la tribune : malgré la volonté, les objectifs de production (11 000 logements par an) ne sont pas atteints, plafonnant entre 7 000 et 7 500 unités. « Un premier PLH voté à l'unanimité il y a un an, est un signal inattendu, toutes tendances confondues, de prendre à bras le corps cette problématique du logement sur la métropole. Mais nous ne pouvons pas continuer à voter des documents d'urbanisme que l'on n'applique pas au final ».
Le statut du bailleur privé, une bouée de sauvetage ?
Face à la fin du Pinel et à la frilosité des investisseurs institutionnels, c'est donc bien vers les particuliers que se tournent désormais les regards. Annoncé comme une mesure de rupture, le futur statut du bailleur privé, défendu par la FPI et plusieurs parlementaires, pourrait relancer la machine.
Portée dans un rapport remis ce lundi 30 juin au gouvernement, par le sénateur du Nord, Marc-Philippe Daubresse, avec son collègue Mickaël Cosson, cette réforme promet un amortissement fiscal « choc » sur les nouveaux investissements locatifs réalisés à partir du 1er janvier 2026. L'idée ? Autoriser les propriétaires-bailleurs à déduire chaque année au moins 5 % de la valeur du bien (hors terrain, soit 80 % de la valeur totale) de leurs revenus locatifs, sur une période de 20 ans. Mieux : ce taux pourrait être majoré d'un point pour les logements loués à des loyers inférieurs de 15 % au marché. Objectif : générer un déficit foncier déductible du revenu global, et ainsi rendre l'investissement plus attractif malgré la hausse des taux et des charges.
Mais il ne s'appliquerait qu'aux logements neufs, ou aux anciens rénovés selon des critères énergétiques stricts. « Le principal sujet, aujourd'hui, c'est la relance du neuf », insiste Marc-Philippe Daubresse. « Sinon la crise durera encore cinq ans. » Ce nouveau statut viserait à « frapper fort, tout de suite », avec un mécanisme étalé dans le temps. « L'État encaisse la TVA immédiatement, alors que le coût fiscal de l'amortissement est lissé sur 20 ans », plaide l'ancien ministre du Logement. Mais rien n'est gagné. Bercy veille et l'orthodoxie budgétaire pèse. « Si on inclut les anciens logements, le dispositif coûtera trop cher et sera enterré », prévient-il. Sentiment partagé à demi-mot par la ministre du Logement, Valérie Létard, intervenant par visioconférence depuis son ministère parisien.
Reste à convaincre que l'investisseur privé n'est pas « un affreux rentier spéculateur », mais bien un ménage qui permet de loger ses concitoyens.
Besoin d’un crédit immobilier ?
Comparez gratuitement les offres de plus de 100 banques pour votre projet immobilier
Le temps long de la transformation de la promotion immobilière
Mais l'urgence se heurte à l'inertie. Eric Groven, président de Sogeprom, alerte sur « la fin de l'âge d'or » de la promotion immobilière. Le modèle économique doit se réinventer, selon lui, face au ZAN, à la fin de la taxe d'habitation pour les communes et à des opérations de plus en plus complexes à porter. Il prône une diversification vers la régénération urbaine, l'innovation via la proptech, quand Jacques Olivier Hurbal, président de la SOCFIM, évoque une priorité absolue au logement abordable, qui représente désormais 80 % de la production.
La transformation est également réglementaire. Plusieurs élus nationaux ont plaidé pour un « Big Bang » du droit de l'urbanisme, devenu inadapté. Le député François Jolivet a appelé à libérer la hauteur dans les PLU, regrettant que seule une minorité de projets atteignent leur potentiel constructif. « Il faut expliquer aux Français que construire, c'est d'intérêt général », a-t-il martelé, dénonçant l'opposition systématique aux grues et aux chantiers.
Comparaisons internationales : quand la politique française n'est pas à la hauteur des enjeux
À l'étranger, les ambitions sont d'un tout autre calibre. Le Royaume-Uni prévoit 1,5 million de logements neufs d'ici 2030, avec une banque nationale du logement. L'Allemagne a lancé une loi d'exception permettant 400 000 constructions annuelles jusqu'à 2030. Dérogations au PLU, accélération des permis, reconversion de bâtiments publics : les leviers sont nombreux.
En France, les Jeux Olympiques et les lois d'exception prises auraient pu servir de tremplin. Ils n'ont été qu'un signal perdu jusqu'ici. « Il manque un vent dans le dos », déplore Eric Groven pour filer la métaphore maritime, alors que les congressistes voyaient les bateaux amarrés derrière lui.
Ce 53e Congrès de la FPI aura été à la fois un cri d'alerte et un manifeste de résilience. La profession sait que le pire est peut-être devant elle, avec une crise appelée à durer jusqu'en 2028 selon certains. Mais elle croit encore en une sortie de crise, à condition que le futur statut du bailleur privé voie rapidement le jour, que l'urbanisme soit vraiment libéré et si l'État assume enfin une impulsion politique forte. « Le promoteur n'est pas un profiteur, mais un bâtisseur de solutions », pourrait être la synthèse de ce congrès. Encore faut-il que l'écosystème lui permette de poser la première pierre.