Pôle Habitat FFB : « La bombe sociale qu'est le logement a explosé, comment circonscrire l'incendie ? »
Face à une crise historique, l’immobilier neuf entrevoit un timide rebond. Mais entre faillites, chute des mises en chantier et freins réglementaires, le secteur est à un tournant décisif, selon le Pôle Habitat de la FFB. Quelles solutions pour éviter l’effondrement ?

Face à une crise historique, l’immobilier neuf entrevoit un timide rebond. Mais entre faillites, chute des mises en chantier et freins réglementaires, le secteur est à un tournant décisif, selon le Pôle Habitat de la FFB. Quelles solutions pour éviter l’effondrement ?
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L'année 2024 s'est de nouveau révélée particulièrement difficile pour le secteur de l'immobilier neuf en France. Baisse des ventes, défaillances d'entreprises en hausse, réduction des mises en chantier... Le bilan est alarmant, mais quelques signaux d'optimisme émergent en ce début 2025. Le président du Pôle Habitat FFB, Grégory Monod, invite cependant à la prudence. Décryptage des derniers chiffres et des enjeux à venir.
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Un marché toujours en crise, mais des signes d'amélioration
Si l'année 2024 a été marquée par un recul massif de la construction neuve, la reprise du crédit immobilier semble apporter une lueur d'espoir. En effet, à la fin janvier 2025, les prêts accordés aux particuliers ont progressé de 9,1 % sur un an, grâce à la baisse des taux et à l'allongement des durées d'emprunt de plus de 2,4 mois en moyenne en 2024.
Côté prix, la tendance est également à la baisse. La construction de maisons individuelles affiche un recul de 4,2 %, avec un prix moyen désormais fixé à 207 000 euros et une surface réduite à 113 m² (-3 m²). Pour le logement collectif, le prix au mètre carré a diminué de 0,7 %, atteignant 4 713 euros/m². De son côté, la construction groupée affiche un recul des prix de 1,2 %.
Malgré des ajustements tarifaires et la reprise des financements, les volumes de ventes restent préoccupants. En 2024, seuls 111 600 logements neufs ont trouvé preneur, un chiffre en chute de 48,5 % par rapport à la moyenne de long terme (216 000 ventes) et très éloigné du pic de 259 000 ventes observé en 2021. Même constat quand on regarde uniquement la construction de maisons individuelles. 2024 se termine par un recul de 13.3 % en un an et seulement 50 800 maisons neuves vendues. C'est un recul de 60 % par rapport à la moyenne de long terme. L'ensemble des régions sont concernées avec des baisses allant de 3.2 % dans les Hauts-de-France à - 24 % dans le Centre Val de Loire. A noter une possible inversion de tendance avec un rebond de 17.3 % des ventes au dernier trimestre 2024.
Un secteur sous tension, entre déstockage et pénurie à venir
La promotion immobilière montre aussi des signes de reprise dans certaines régions. L'Occitanie (+27,8 %) et la Bretagne (+17,2 %) enregistrent une hausse notable des ventes aux particuliers sur 2024, traduisant un frémissement du marché. Toutefois, les mises en vente restent en forte baisse : - 29,1 %, tandis que les ventes nettes aux particuliers reculent de 3,7 %.
Le plus grand sujet d'inquiétude concerne les mises en chantier, en recul de 11,1 % sur un an en 2024, avec un effondrement de 26,6 % par rapport à la moyenne de long terme. Par ailleurs, les permis de construire ont chuté de 12,3 % en 2024, soit 22 % de moins que la moyenne historique. Cette situation risque d'engendrer une pénurie encore plus marquée de logements neufs d'ici 2025-2027, puisque l'on estime qu'un tiers des permis délivrés ne se concrétisent pas en mises en chantier.
« Nous assistons à un décrochage qui va encore s'accentuer dans les années à venir », alerte Grégory Monod. Avec seulement 8 mises en chantier pour 1 000 ménages, la production de logements neufs en France atteint des niveaux comparables à ceux des années 1950.
Un secteur fragilisé par des faillites en cascade et une perte de l'outil de production
Les difficultés du secteur se traduisent par une explosion des défaillances d'entreprises. En un an, 677 entreprises de promotion immobilière ont été enregistrées en défaillance selon Altares (+ 147 %), contre 274 en 2023. La construction de maisons n'est pas épargnée, avec une hausse de 28 % des faillites (1 114 entreprises concernées). En conséquence, les effectifs ont fondu de 40 % en deux ans, et encore 5 à 10 % des emplois pourraient disparaître dans les premiers mois de 2025, selon une enquête flash auprès des adhérents du Pôle Habitat FFB.
Les banques, de plus en plus frileuses à financer et garantir des opérations nouvelles, accentuent l'incertitude des opérateurs, alors qu'un projet sur trois est retiré, voire abandonné faute de clients suffisants. Cette situation provoque une contagion économique touchant aussi bien les industriels en amont que les artisans et sous-traitants en aval.
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Les mesures gouvernementales : un premier pas, mais encore insuffisant
Face à l'ampleur de la crise, le gouvernement a enfin pris des mesures pour tenter d'endiguer la chute. L'élargissement du prêt à taux zéro, PTZ et l'exonération des droits de mutation sur les donations constituent des leviers de solvabilisation et de relance de la confiance, d'après le Pôle Habitat, qui estime que bien d'autres réformes plus structurelles sont indispensables pour relancer durablement la construction. Parmi elles, la création d'un véritable statut incitatif pour les bailleurs privés et la simplification des règles d'urbanisme. Le projet de loi TRACE, visant à assouplir les contraintes du Zéro Artificialisation Nette, ZAN, est particulièrement attendu.
Mais pour Grégory Monod, le problème est plus profond. Il pointe du doigt les politiques locales qui entravent la construction avec des exigences toujours plus contraignantes dans les documents d'urbanisme et autres chartes : « On impose des quotas de 30 à 100 % de logements aidés par opération, ce qui est économiquement intenable. » Il appelle à un changement de cap urgent : « Arrêtons le toujours plus, qui conduit au final à construire moins. »
Enfin, la mise en oeuvre des prochains seuils de la réglementation environnementale, RE2020, risque d'alourdir encore les coûts et de freiner davantage la relance de l'accession à la propriété.
La construction à un tournant décisif
Compte-tenu de ces chiffres 2024, l'immobilier neuf traverse toujours une crise majeure dont les effets se feront sentir pendant plusieurs années, prévient la fédération. Si des signaux positifs émergent, notamment grâce à la reprise du crédit immobilier et aux premières actions gouvernementales, l'ampleur de la crise reste considérable. Pour éviter une crise du logement encore plus profonde, il est urgent, selon le Pôle Habitat de la FFB, de mettre en place des mesures structurelles, favorisant à la fois l'investissement locatif, la simplification administrative et plus largement un soutien à la construction neuve.
Comme le souligne Grégory Monod, « nous restons mobilisés pour que des mesures complémentaires et pérennes soient prises afin d'inverser durablement la tendance. » Le secteur de l'immobilier neuf est à un tournant décisif : « la bombe sociale qu'est le logement a déjà explosé, c'est désormais un véritable incendie qu'il va falloir circonscrire, pas uniquement pour notre filière mais pour l'accès au logement de toute la société », selon le président. Reste à savoir si les pouvoirs publics, tant au niveau national que local à l'approche des élections municipales, sauront prendre les décisions nécessaires avant qu'il ne soit trop tard, conclut le Pôle Habitat de la FFB.