Logement neuf : une crise sans précédent et quelques espoirs
Alors que le marché du logement neuf s’asphyxie sous les baisses d’offre et les freins financiers qui bloquent la demande, la FPI alerte sur une crise historique. Une réponse politique d’urgence s’impose pour sauver ce secteur vital à l’économie et aux finances publiques.
Alors que le marché du logement neuf s’asphyxie sous les baisses d’offre et les freins financiers qui bloquent la demande, la FPI alerte sur une crise historique. Une réponse politique d’urgence s’impose pour sauver ce secteur vital à l’économie et aux finances publiques.
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Accablants, sanglants... voilà quelques-uns des qualificatifs utilisés par la FPI, Fédération des Promoteurs Immobiliers, pour décrire l'état critique du marché du logement neuf en France au terme du troisième trimestre 2024. Marqué par une réduction significative de l'offre et des mises en vente, l'immobilier neuf se trouve toujours largement fragilisé par les tensions économiques et les retards réglementaires, tandis que le besoin de logements abordables et qualitatifs reste criant. Entre mesures gouvernementales attendues, capacité des acteurs de la promotion immobilière à traverser cette crise et contexte budgétaire en mutation, l'avenir du secteur semble suspendu à des décisions politiques et économiques majeures.
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Un « assèchement de l'offre » de logements neufs
Les derniers chiffres dévoilés lors d'une conférence de presse par la FPI soulignent une baisse drastique des mises en vente, avec une nouvelle chute de 41 % au troisième trimestre 2024 comparé à la même période en 2023. Avec moins de 8 700 logements commercialisés, soit trois fois moins qu'une année normale, ce niveau d'activité atteint un seuil historiquement bas depuis 2010. En cumul sur les neuf premiers mois de l'année, le recul atteint 33,7 %, avec seulement 39 000 logements neufs commercialisés, soit deux fois moins qu'en 2022.
Dans le même temps, le marché est confronté à un niveau record de retraits d'opérations : 32 % contre 5 % en temps normal de programmes dont la commercialisation a été suspendue ou arrêtée définitivement durant le trimestre. C'est l'équivalent d'un programme sur trois qui a été abandonné en trois mois. Du jamais vu !
Les réservations de logements neufs, bien que légèrement stables (-2,5 % au T3 2024), n'atteignent plus les niveaux habituels, avec moins de 65 000 logements vendus depuis le début de l'année, soit moitié moins que sur une année normale. Aurait-on enfin atteint un point bas, s'interroge la FPI.
Dans ce contexte, les promoteurs s'appauvrissent en foncier et en compétences, avec un recul des effectifs de 34 000 à 27 000 salariés en quelques mois. Pascal Boulanger, président de la FPI France, redoute qu'à terme, rien ne soit prêt pour une éventuelle reprise du marché.
Quelques lueurs d'espoirs pour l'immobilier neuf
Malgré une baisse des taux d'intérêt et un taux d'usure moins contraignant, la crise de l'offre pourrait s'intensifier avec la fin programmée du dispositif Pinel en janvier 2025. Cette aide fiscale, qui a soutenu l'investissement locatif pendant une dizaine d'années, ne sera pas remplacée. La fin des plans de rachat institutionnel, par Action Logement et CDC Habitat notamment, devraient encore amplifier l'incertitude, avec des conséquences déjà visibles. Les ventes en bloc ont déjà reculé de presque 13 % au troisième trimestre. Un recul qui n'est pas compensé par la légère reprise des ventes aux particuliers.
Les ventes au détail montrent une hausse des acquisitions par des particuliers : + 4,3 % au T3 2024 et donc une légère reprise de la demande. Les ventes aux investisseurs privés progressent de 5 %, tandis que celles pour la résidence principale augmentent de 3,9 %. Un léger rebond qui pourrait s'expliquer notamment par un « effet d'aubaine créé par la fin du Pinel », précise la FPI.
Les banques, encouragées par un retour de la demande, semblent motivées à prêter pour des projets d'acquisition. Toutefois, cette volonté ne parvient pas à pallier les problématiques structurelles du secteur. Selon Pascal Boulanger, « sans une offre suffisante, ces signaux encourageants pourraient se révéler insuffisants », et le marché risque de basculer dans une crise encore plus profonde, créée par de nouvelles surenchères sur les fonciers, les salaires... un « effet boomerang » qu'on peine à imaginer.
La FPI appelle le gouvernement à une mobilisation urgente
Les signaux du gouvernement semblent montrer une prise de conscience de l'enjeu que représente le logement pour l'économie. Bruno Le Maire, ancien ministre de l'Économie, a admis que le secteur du logement nécessitait des actions fiscales et structurelles pour redynamiser l'offre. Pascal Boulanger reconnait travailler dans l'ombre avec l'actuel gouvernement et la nouvelle ministre du Logement, Valérie Létard, pour inclure des mesures de soutien dans le PLF 2025, même en cas de 49.3.
La FPI et les 10 membres de l'Alliance pour le Logement ont d'ailleurs proposé une liste de 50 mesures réglementaires pour simplifier l'acte de construire et alléger les contraintes normatives. Toutefois, ces propositions, transmises aux ministères concernés, n'ont encore jamais donné lieu à des actions concrètes.
Si des mesures d'urgence sont nécessaires, les professionnels de l'immobilier neuf appellent également à des solutions plus durables. Jacques Ehrmann, vice-président de la FPI France et directeur général d'Altarea Cogedim, 2e promoteur français, souligne la nécessité d'une grande loi pour le logement dès 2025 pour « restructurer et réinventer », qui renforcerait notamment le statut sociétal de l'investisseur privé. Un statut d'investisseur pérenne et équilibré serait capital pour soutenir le marché locatif et renforcer l'attractivité de ce secteur face à d'autres placements financiers. « Il faut un changement de paradigme des prescripteurs qui doivent se demander chaque matin comment aider à construire du logement et pas comment freiner ceux qui veulent construire », résume Jacques Ehrmann.
Le logement neuf, un pilier économique essentiel
Le secteur du logement neuf en France reste en effet un moteur économique clé. La FPI rappelle qu'il génère de nombreux emplois et contribue aux recettes fiscales, la TVA étant fixée à 20 % pour les ventes de logements. À ce titre, le logement conditionne l'ensemble de l'économie, en permettant aux autres secteurs d'évoluer grâce à des salariés convenablement logés. L'écosystème du logement neuf comprend une multitude d'acteurs : notaires, architectes, bureaux d'études, déménageurs, cuisinistes, agences immobilières, etc., qui dépend de la stabilité et de la croissance de ce secteur. D'où le célèbre adage : quand le bâtiment, tout va ! Et actuellement, cela ne va pas.
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Vers une « année sanglante » en 2025 ?
L'année 2025 s'annonce particulièrement complexe. La fin du Pinel, la crise de l'offre et le ralentissement des ventes en bloc laissent présager une année « sanglante » si des mesures fortes ne sont pas rapidement mises en oeuvre. Le retard de nouvelles initiatives ou de politiques publiques notamment pour remplacer le dispositif Pinel pourrait pousser les promoteurs encore plus vers la faillite et fragiliser davantage le secteur de la construction.
Les conséquences s'étendent déjà aux territoires, avec des offres commerciales en diminution drastique. Par exemple, dans la métropole de Nantes, le délai d'écoulement atteint désormais 29,5 mois, un indicateur de marché déséquilibré. Ce chiffre reflète le manque d'adéquation entre l'offre et la demande.
D'autant que le prix technique du logement neuf résultant du coût d'achat du foncier, du coût de construction... « véritable serpent de mer », rappelle Pascal Boulanger, ne permet pas de s'adapter facilement au niveau de solvabilisation des ménages. Facialement, le prix du neuf a tendance à se stabiliser à 4 904 €/m² dans l'hexagone au terme du troisième trimestre. Loin des 15 % de baisse espérée et déconnectée des pouvoirs publics, rappelle la FPI.
Une attente de soutien et de décisions stratégiques
Pour éviter une crise encore plus marquée, la FPI appelle à un soutien renforcé du gouvernement. Avec les mesures envisagées dans le Projet de Loi de Finances 2025, il reste à espérer que des solutions concrètes soient mises en place pour stimuler l'offre et répondre au besoin national en logements.
En attendant des décisions stratégiques, certains dispositifs, comme l'amendement Jolivet qui pourrait prolonger les délais pour authentifier les ventes sous Pinel, sont à l'étude, laissant planer l'espoir d'une « bonne nouvelle ». Pascal Boulanger conclut : « Nous sommes à la croisée des chemins, et espérons que les autorités comprendront l'urgence d'agir pour garantir l'accès au logement pour tous et préserver la viabilité d'un secteur essentiel à l'économie française ».