Le marché des résidences étudiantes en Europe s'apprête à connaître une croissance spectaculaire, selon le rapport annuel European PBSA Investment Barometer Report 2024, publié par The Class Foundation en collaboration avec Savills. Les investisseurs anticipent une augmentation de 70 % de leurs portefeuilles au cours des deux à cinq prochaines années, avec un potentiel de 1,7 million de nouveaux lits. Malgré des problématiques persistantes, l'investissement en résidence étudiante résiste. 

 

Une demande croissante alimentant le marché du logement étudiant

 

L'essor du secteur de la résidence étudiante s'explique par la montée en flèche des inscriptions dans l'enseignement supérieur, notamment parmi les étudiants internationaux, et par une attention accrue à la qualité de vie étudiante. Cette dynamique attire l'attention des investisseurs : environ 63 % d'entre eux considèrent ce secteur comme l'un des plus attractifs parmi les segments résidentiels, selon une enquête de Savills menée cette année. Les prévisions sont optimistes : l'investissement pourrait s'élever à 22 milliards d'euros pour ajouter 92 500 lits, portant le total à plus de 220 000 lits d'ici cinq ans.
Malgré cette expansion, le taux de couverture des résidences étudiantes en Europe resterait limité, passant de 11 % actuellement à seulement 17 %. Cette situation met en lumière l'écart persistant entre l'offre et la demande, représentant une opportunité unique pour les acteurs privés.

 

Les marchés les plus prisés et l'évolution des priorités

 

Les destinations phares pour les investissements incluent l'Espagne, le Portugal, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et l'Allemagne. L'accent est mis sur les grandes villes universitaires, telles que Madrid, Londres et Amsterdam, bien que certains investisseurs commencent à explorer les marchés secondaires. Cette diversification reflète la maturité croissante du secteur, qui s'étend désormais au-delà des pôles traditionnels.

 

Les enjeux structurels et réglementaires de la résidence étudiante

 

Coûts de construction et disponibilité des terrains

L'un des principaux obstacles au développement du secteur est l'augmentation des coûts de construction. Après des hausses à deux chiffres en 2022, l'inflation des coûts s'est stabilisée entre 1 % et 4 % en 2024, mais les marges restent serrées. Près de 40 % des investisseurs signalent des difficultés à acquérir des terrains, tant en zones vertes qu'en zones urbaines, ce qui complique davantage l'expansion.

 

Réglementation sur l'abordabilité

Les préoccupations liées à l'abordabilité des logements étudiants, exacerbées par l'augmentation du coût de la vie, ont conduit certains gouvernements à envisager des régulations des loyers. Ces mesures inquiètent les investisseurs : près de 90 % estiment qu'elles nuiraient à leur capacité à atteindre leurs objectifs financiers. Une réglementation excessive pourrait déplacer les investissements vers des marchés plus flexibles, ralentissant l'offre dans les zones déjà en tension.

 

Le défi environnemental : entre contraintes et opportunités

 

La transition écologique est une priorité majeure. Près de 26 % des actifs des investisseurs nécessitent des améliorations pour répondre aux normes ESG (Environnement, Social, Gouvernance). Bien que la majorité des répondants privilégient la rénovation de leurs actifs, certains envisagent des ventes, ouvrant des opportunités pour d'autres acteurs adeptes de stratégies de réhabilitation « brown to green ».

 

Capitaux disponibles : un tableau contrasté

 

Si la disponibilité de la dette s'améliore grâce à l'intérêt croissant des prêteurs pour les secteurs résidentiels, l'accès à des capitaux propres reste un enjeu, notamment pour les nouveaux projets de développement. Les investisseurs prévoient tout de même une augmentation significative des flux de capitaux mondiaux, principalement en provenance d'Amérique du Nord et du Moyen-Orient, ce qui pourrait dynamiser le marché.

 

Quel avenir pour l'investissement en résidence étudiante ?

 

Le rapport souligne l'importance d'une collaboration proactive entre les investisseurs, les universités et les décideurs politiques. Une concertation accrue permettrait de garantir des régulations équilibrées, favorisant à la fois les objectifs des investisseurs et les besoins des étudiants.
En investissant dans des initiatives sociétales et environnementales, en modernisant leur parc immobilier et en explorant de nouveaux marchés, les investisseurs peuvent, selon cette étude, non seulement tirer parti des opportunités offertes par le secteur des résidences étudiantes neuves, mais aussi contribuer à créer des communautés universitaires durables et dynamiques.
Le secteur des résidences étudiantes en Europe semble donc être à un tournant décisif. Les décisions stratégiques prises aujourd'hui façonneront non seulement le paysage de l'investissement immobilier, mais également les expériences éducatives de millions d'étudiants dans les années à venir, quand on sait que plus d'un étudiant sur 10 en France a refusé certaines orientations en raison des difficultés à se loger.