Stéphane Dalliet, Nexity : « Une baisse de la demande, mais pas du besoin »
Directeur Général du Pôle Promotion Résidentielle de Nexity, Stéphane Dalliet réagit aux chiffres du leader de la promotion immobilière en France, qui malgré le recul du marché, parvient à gagner des parts de marché.

Directeur Général du Pôle Promotion Résidentielle de Nexity, Stéphane Dalliet réagit aux chiffres du leader de la promotion immobilière en France, qui malgré le recul du marché, parvient à gagner des parts de marché.
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- Dans quel contexte présentez-vous les résultats financiers 2022 pour ce qui est de l'immobilier résidentiel ? Malgré le recul de vos ventes, Nexity parvient à gagner encore des parts de marché ?
« Les ventes aux particuliers reculent en effet, mais dans la même proportion que la tendance nationale, soit à - 24 %. Cela s'explique aussi par le fait que quand nous avons observé ce point de faiblesse lié au taux d'intérêt, au taux d'usure, aux difficultés d'obtention des prêts..., nous avons réorienté une partie de l'offre pour la vente au détail vers de la vente en bloc aux institutionnels. Un choix stratégique assumé et qui nous a permis de préserver un certain volume global de ventes et à conserver et amplifier notre part de marché. »
- A quoi est due cette baisse des ventes auprès des particuliers : moins d'attractivité pour le neuf ? Le durcissement des conditions de crédit ?
« C'est la baisse de la demande ; mais pas du besoin. En début d'année dernière, la crise ukrainienne a entraîné une hausse importante du coût de construction et de fait, du prix des logements. Tous promoteurs confondus, c'est une hausse moyenne de 5 %, un peu moins chez Nexity de par notre positionnement en faveur du logement abordable. A partir du deuxième semestre, effet ciseau avec des logements plus chers et des taux d'intérêt qui explosent, passant de 1,10 % à 2,40 %. Même si l'allongement des durées a permis en partie de compenser, nous sommes passés de 166 mois de durée moyenne en 2001 à 246 mois aujourd'hui. Cela n'a pas pu empêcher la désolvabilisation d'une partie des acquéreurs potentiels, principalement les primo-accédants, les plus touchés étant les ménages avec moins de 40 000 euros de revenus annuels. A cela s'ajoute, un attentisme fort du reste de la clientèle.
Autre difficulté mécanique pour les investisseurs particuliers, comme les banques ne tiennent plus compte du reste à vivre et de 100 % des loyers obtenus, cela les pénalise. »
- Est-ce que la pertinence du dispositif Pinel est remise en cause avec la hausse des prix ?
« Notre analyse est que le retrait s'explique davantage par les difficultés à obtenir des prêts pour financer les investissements Pinel qu'en raison de l'attrait de ce dispositif. Il y a d'ailleurs eu un certain effet d'aubaine à authentifier les ventes en fin d'année pour profiter à plein du Pinel version 2022. Cela pourrait être encore le cas cette année. Encore faut-il que les investisseurs puissent se financer et avoir confiance en leur achat. Notre part de ventes en Pinel diminue légèrement mais au profit du LMNP, des résidences gérées..., qui permettent encore des rentabilités confortables, avec de petits tickets d'entrée, en tout cas moindre que pour l'achat d'un appartement de deux ou trois-pièces. L'immobilier géré a du succès car cela s'inscrit dans une nouvelle dynamique du parcours résidentiel : coliving, Build to Rent, résidences gérées... correspondent aux nouvelles façons d'habiter et aux nouveaux usages. »
- Comment se déroule commercialement ce début d'année ? Est-ce que la demande retrouve un peu de vigueur après la fin d'année moribonde ?
« La demande s'améliore légèrement mais c'est loin d'être satisfaisant. Nous avons une part plus importante de demande pour de la résidence principale, preuve que le besoin est toujours là. Nous observons que, plus que jamais, nous avons besoin d'assister nos clients dans la recherche de prêt immobilier. Nous avons d'ailleurs un service dédié baptisé Nexity Solution Crédit qui accompagne nos clients très amont pour évaluer leur capacité d'emprunt.
- Est-ce que vous êtes amenés à réaliser d'importantes remises commerciales au cas par cas pour éviter les refus de prêt et soutenir certains de vos clients ?
« Pour vous répondre, il faut distinguer deux types d'opérations. Sur un programme neuf qui est engagé en travaux et encore en commercialisation, nous pouvons être amenés à faire des offres commerciales pour retrouver une stabilité financière et un marché. Après, sur toutes les autres opérations en commercialisation, ce qui représente 70 % de nos projets dont les terrains n'ont pas été encore achetés, dont les travaux n'ont pas démarré, depuis quelques mois, très en amont, nous préférons reconfigurer pour avoir une meilleure équation entre le prix du logement et la capacité de solvabilisation de nos clients.
Cela ne passe pas forcément par la renégociation du prix du foncier mais par davantage de densité ou par un changement de programmation. Sur ces opérations, nous n'aurons pas besoin de faire d'offres commerciales. Nous sommes revenus aux fondamentaux du métier de promoteur, après une période où le manque d'offre suffisait à faire vendre. Nous sommes très attentifs à la segmentation client en fonction du lieu, de la typologie de clients à qui nous voulons s'adresser. Nous sommes devenus assez sélectifs sur le choix de certains fonciers, nous avons pu abandonner des opérations quand nous ne trouvions pas l'équilibre économique, mais c'est rare désormais. »
- Une réunion s'est tenue au ministère du Logement avec la FPI et une dizaine de promoteurs nationaux. Est-ce le signe d'une prise de conscience de la part du gouvernement des difficultés du moment ? Quelles seraient les mesures à prendre ?
« Nous avons bien compris que le gouvernement voulait mettre l'accent sur la transition écologique et la rénovation. C'est un bon axe d'attaque. Nous faisons de la réhabilitation, que nous appelons d'ailleurs de la régénération urbaine. Il s'agit avec de l'existant, en milieu urbain, de régénérer une nouvelle offre immobilière ; parfois en démolissant, parfois en réhabilitant, souvent les deux, avec des programmations mixtes. Nous faisons aussi de l'assistance à maîtrise d'ouvrage en tant que syndic.
En tant que co-animatrice du CNR Logement, vous pouvez compter sur Véronique Bédague, notre PDG, pour faire passer les bons messages et attirer l'attention du gouvernement sur la situation actuelle dans le neuf. Nous sommes à environ 120 000 logements vendus en 2022 au niveau national, contre 162 000 l'année d'avant. Les répercussions négatives seront assez rapides sur le monde du BTP, peut-être même dès cette année, et encore davantage l'année prochaine. Sans oublier les conséquences à terme sur le marché locatif. »
- Quelles perspectives pour 2023 ? Sur quoi travaillez-vous chez Nexity pour faire face aux difficultés actuelles ?
« Nous envisageons 2023 avec prudence, lucidité et surtout avec une grande agilité. L'agilité de notre groupe, malgré notre taille, à réorienter vers de la vente en bloc a été une stratégie payante. Nous pensons que le premier semestre 2023 sera de la même teneur que le second semestre 2022, avec toujours la capacité à aller chercher des investisseurs institutionnels avec de nouvelles offres : du Build-to-Rent, mais aussi de nouveaux produits en immobilier opéré pour proposer une autre manière de se loger.
- Quelles sont les opérations emblématiques de votre savoir-faire et de votre capacité à rebondir ?
« Nous avons un programme neuf à Tours, Parc'coeur, déjà en travaux. Il s'agit d'une opération où nous avons fait appel à un écologue pour mettre en place des mesures dédiées à la protection de la biodiversité. Beaucoup en parlent mais nous le faisons : nous avons utilisé du réemploi de matériaux. Grâce à notre partenaire, Tours Habitat, qui était en train de démolir une partie de son parc social, nous avons réutilisé la pierre de Touraine pour construire avec. Nous avons plusieurs bâtiments en bois et une programmation mixte avec une résidence jeunes actifs, des logements sociaux et en accession. Cette opération affiche un vrai savoir-faire sur la biodiversité, certifié par le label BiodiverCity.
Autre opération Infini Blue à Sainte-Adresse, près du Havre, dans un parc paysager de 2,4 hectares avec 96 % des logements avec des vues mer. Sa particularité : certes, nous allons construire du neuf avec une résidence senior, des logements sociaux, du BRS, beaucoup de logements en accession libre et la reconversion d'un immeuble existant emblématique, celui de l'Ecole de la Marine Marchande, que nous allons réhabiliter pour faire du logement haut de gamme. En plus de cette ambition programmatique, nous allons créer un véritable quartier avec un centre culturel, des restaurants, des commerces, une crèche... une nouvelle vie sur ce site et c'est l'exemple du moment pour régénérer une offre nouvelle sur un site exceptionnel en conservant un maximum du passé. »