Pascal Boulanger, FPI : « 2023 sera catastrophique si des mesures ne sont pas prises immédiatement »

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Le président de la Fédération des Promoteurs Immobiliers, Pascal Boulanger, vient de dresser un bilan alarmant de la promotion immobilière en 2022 et qui semble encore plus catastrophique en ce début 2023. Il réclame une loi fiscale d’exception pour relancer la machine.

Président de la FPI Pascal Boulanger
Le président de la Fédération des Promoteurs Immobiliers, FPI, Pascal Boulanger, réclame des mesures immédiates pour éviter une catastrophe. © Studioanna

Le président de la Fédération des Promoteurs Immobiliers, Pascal Boulanger, vient de dresser un bilan alarmant de la promotion immobilière en 2022 et qui semble encore plus catastrophique en ce début 2023. Il réclame une loi fiscale d’exception pour relancer la machine.

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- Difficile d'imaginer que les chiffres 2022 sont aussi mauvais que ceux de 2020, l'année du Covid et des confinements stricts ?

 

« C'est pourtant une triste réalité. Pour se remettre dans le contexte, depuis les élections municipales de 2020 et jusqu'à la rentrée 2022, les promoteurs immobiliers étaient confrontés à une crise de l'offre et nous réclamions surtout une aide aux maires bâtisseurs. Mais depuis cet été, nous avons subi plusieurs fléchissements successifs avant un effondrement complet depuis le mois de décembre. Les premiers retours sur le premier trimestre 2023 sont même catastrophiques. A la crise de l'offre, nous subissons une crise conjuguée de l'offre et de la demande. Nous continuons à voir notre offre s'effondrer en termes d'autorisations de construire ; mais la demande est tellement faible actuellement que nous reconstituons de l'offre (NDLR : + 10,7 % et environ 95 000 logements disponibles à fin 2022). Nous ne vendons plus rien. Pour preuve, le taux de désistement qui est historiquement de 13 %, c'est-à-dire 13 désistements pour 100 réservations brutes, est monté à 27 % en 2022 et même à 50 % depuis le 1er décembre. Les exemples se multiplient de promoteurs avec un nombre négatif de réservations nettes sur ce début d'année. Des mois négatifs que nous n'avons jamais connu. »

 

- Qu'est-ce qui explique un tel niveau ? Les refus de prêt ? 

 

« Pas seulement les refus de prêt immobilier malheureusement. Il y a aussi un effet psychologique avec des désistements dans les quelques jours après avoir signé les contrats de réservation, le temps d'un weekend, sans même avoir pu consulter les banques. Hausse des taux d'intérêt, inflation, coût des matériaux... il y a une crainte et une perte de confiance qui s'installent. C'est un phénomène de désistement inédit et nous allons l'étudier plus en détails. »

 

- Pourtant, le besoin est toujours là et une étude exclusive le prouve.

 

« La catastrophe de 2022 qui a débuté en toute fin d'année, (NDLR : - 40 % de ventes aux particuliers au TM4 2022) se poursuit en ce début 2023 et pourtant, le besoin est toujours là. Nous l'avons démontré avec une étude inédite menée par ESCP junior Conseil. Une étude indépendante et méthodique qui analyse le besoin de logements neufs à 450 000 chaque année pendant dix ans et nous en sommes très loin.

taux désistement logement neuf
Le taux de désistement a été multiplié par deux en 2022, à 27 % ; il grimpe même à 50 % rien qu'en décembre. © Shutterstock
Les maires ne veulent plus construire. Les PLU actuels, qui sont déjà plus restrictifs que les anciens POS, ne sont utilisés qu'à 65 % de leur capacité. Chaque maire prend ses propres décisions en matière de densité et c'est toujours moins qu'auparavant. On nous parle du ZAN, Zéro Artificialisation Nette ; nous ne sommes pas contre le ZAN mais nous avons peur du double effet du ZAN. D'accord pour ne plus artificialiser les terres naturelles et agricoles ; mais en parallèle, on ne nous laisse pas densifier les zones déjà artificialisées. Il faut nous laisser développer la ville sur la ville, avec de la hauteur. Laissez-nous faire la ville intense pour loger nos concitoyens. »

 

- Des mesures d'urgence sont indispensables. De quelles teneurs ?

 

« Il y a deux types de mesures à prendre. Nous avions présenté des mesures pérennes sur le long terme, présentées lors de notre Appel de Strasbourg, comme le statut du bailleur privé... mais là, l'urgence est telle que lors de notre récente rencontre avec le ministre en charge du Logement, Olivier Klein, nous avons réclamé des mesures immédiates pour relancer la machine. Pourquoi pas une loi fiscale d'exception, prise ces jours-ci et qui s'arrêterait à la fin de l'année ? Pourquoi ne pas supprimer le taux d'usure pour quelques mois ? Les banques ne peuvent plus prêter à des acquéreurs en matière immobilière car elles perdent de l'argent vu les taux de refinancement. Le robinet est coupé, selon les chiffres que m'annoncent les établissements bancaires. Le taux d'usure est à 4 %, il faudrait prêter, selon eux, à 5,68 % pour rester à l'équilibre. L'inflation est à 7 %. Cela reste toujours pertinent et bon pour l'économie. 
Autres pistes de mesures transitoires : tout logement neuf acheté pourrait être exonéré de droit de succession ou d'impôt sur les plus-values, car il faut impérativement relancer une mécanique arrêtée. Il ne se passe plus rien sur le marché immobilier neuf, cela va entraîner de la casse chez les promoteurs, puis dans les entreprises du BTP... et toute la chaîne de l'acte de construire : architectes, bureaux d'études, bureaux de contrôle... Il y a besoin de mesures immédiates pour contrer l'un effet psychologique et en parallèle, un soutien des banques. »

 

- Comment peut-on rester optimistes pour 2023 ? 

 

« Nous souhaitons rester optimistes mais même si la demande s'améliorait d'ici la fin de l'année, nous avons toujours un gros déficit d'offre et il va falloir remettre la machine en route et trouver des motivations pour que les maires nous autorisent à construire. Car, il existe toujours cette problématique très présente de l'offre. Si nous vendons moins, c'est aussi en raison de cette chute structurelle de l'offre. Fondamentalement, il y a actuellement des raisons bancaires et psychologiques ; mais si nous avions aussi davantage de produits à vendre, cela se traduirait mécaniquement par plus de ventes. N'oubliez pas que nous construisons aussi 54 % des logements sociaux en France et cela ne se rattrapera pas. Il faut que les pouvoirs publics réagissent et vite. »

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