Immobilier neuf : la crise des volumes et l'illusion des prix stables
Le marché du neuf subit une double peine : les prix restent élevés, mais les volumes s’effondrent. Selon la FPI, la crise s’aggrave donc encore au deuxième trimestre 2024, rendant la stratégie des pouvoirs publics inefficace et dépassée, d’autant que le Pinel va disparaître malgré les bons points donnés par la Cour des Comptes dans son dernier rapport.
Le marché du neuf subit une double peine : les prix restent élevés, mais les volumes s’effondrent. Selon la FPI, la crise s’aggrave donc encore au deuxième trimestre 2024, rendant la stratégie des pouvoirs publics inefficace et dépassée, d’autant que le Pinel va disparaître malgré les bons points donnés par la Cour des Comptes dans son dernier rapport.
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Le marché immobilier neuf en France traverse une crise profonde et durable, confirmée par les chiffres les plus récents de l'Observatoire de la FPI, Fédération des Promoteurs Immobiliers. En dépit des récents efforts du gouvernement et notamment du mea culpa du président de la République et du ministre de l'Economie, les prix des logements neufs restent à des niveaux élevés, tandis que les ventes et la production s'effondrent. La stratégie au plus au haut sommet de l'Etat qui visait à faire baisser les prix pour relancer la demande semble de plus en plus inadaptée à la réalité des contraintes économiques et réglementaires.
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Un pari gouvernemental manqué sur la baisse des prix
En 2023, à la fin du Conseil national de la refondation dédié au logement, la Première ministre de l'époque avait dévoilé une stratégie ambitieuse : faire baisser les prix du neuf pour redynamiser la demande. Plus d'un an plus tard, les résultats montrent que cette approche a échoué. Les prix des logements neufs, contraints par des facteurs externes comme les normes, la fiscalité et la rareté des autorisations de construire, se sont stabilisés au lieu de baisser.
D'après les chiffres du deuxième trimestre 2024 fournis par la FPI, les prix des logements neufs n'ont presque pas bougé depuis cinq trimestres. Le prix moyen d'un logement neuf en France reste aux alentours de 5 000 €/m², ce qui démontre que les conditions structurelles du marché ne permettent pas de réduction des prix. Comme le stipule Pascal Boulanger, président de la FPI, les prix des logements neufs sont « techniques » et leur baisse n'est pas envisageable tant que ces contraintes persistent.
Une correction par les volumes, pas par les prix
Le véritable choc dans le marché du neuf concerne les volumes. Alors que les prix se stabilisent pourtant, les ventes s'effondrent. Les chiffres sont sans équivoque : les ventes au détail ont chuté de 22,5 % au deuxième trimestre 2024. Seules les ventes en bloc, avec une hausse de 24,6 %, ont permis de limiter partiellement la chute des ventes globales. Ces ventes en bloc, souvent réalisées par des acteurs institutionnels comme CDC Habitat ou Action Logement appelés à la rescousse, ne représentent pas une solution durable. Elles ne compensent pas la demande des particuliers, qui est le moteur traditionnel du marché immobilier.
Cette contraction des ventes est directement liée à la baisse de la solvabilité des ménages, affectée par l'incertitude économique et politique ainsi que par la stagnation du pouvoir d'achat. La légère baisse des taux d'intérêt initiée en 2024 n'a pas suffi à relancer la demande, les ménages restant prudents face à un marché instable et une offre de logements insuffisante.
Un marché en contraction : l'effondrement des mises en vente
Les promoteurs immobiliers, confrontés à cette chute des ventes, réagissent en ralentissant leurs nouvelles opérations. Le deuxième trimestre 2024 a été marqué par une chute dramatique des mises en vente, qui ont atteint leur niveau le plus bas depuis 2010. Avec seulement 13 953 logements neufs mis en vente, le marché se contracte fortement.
Pire encore, un phénomène récent témoigne de l'ampleur de la crise : près d'un quart des logements en cours de commercialisation ont été retirés de la vente. Ce phénomène, qui s'est accéléré depuis la fin de 2023, révèle l'incapacité des promoteurs à écouler leurs biens dans un contexte de demande déprimée. À terme, cette contraction de l'offre risque d'aggraver la pénurie de logements lorsque la demande reprendra, comme le détaille Pascal Boulanger : « Les acquéreurs, quand ils seront de retour, feront face à une pénurie dramatique de logements ».
Une crise durable, des délais d'écoulement qui s'allongent
Le stock de logements disponibles sur le marché continue d'augmenter en raison de la faiblesse des ventes. Les délais d'écoulement des logements, c'est-à-dire le temps nécessaire pour vendre l'ensemble des logements disponibles, ont atteint un niveau inquiétant. Au deuxième trimestre 2024, ce délai a atteint 23 mois, soit une hausse continue depuis 2020. Certaines métropoles, comme Rouen, Orléans et Lille, affichent même des délais d'écoulement supérieurs à deux ans. Cette accumulation de stocks s'ajoute à la pression sur les promoteurs, qui peinent à équilibrer leur modèle économique.
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Un appel à une politique du logement plus audacieuse
Face à cette crise, la FPI lance un appel au gouvernement pour une refonte en profondeur de la politique du logement. Pour Pascal Boulanger, le nouveau gouvernement va devoir tirer les leçons de ses échecs et agir rapidement pour éviter une aggravation de la situation. Il salue le mea culpa tardif d'Emmanuel Macron et Bruno Lemaire, mais appelle à des actions concrètes, telles qu'une révision des normes et une simplification des autorisations de construire, pour encourager la production de logements neufs.
« J'implore avec force le Premier ministre, de ne surtout pas reproduire les mêmes erreurs en ne prenant pas les mesures nécessaires pour répondre à la crise. Il faut s'engager résolument dans des actions immédiates. Je suis prêt pour une discussion franche et efficace plutôt que de recevoir, dans quelques mois, un nouveau mea culpa », alerte Pascal Boulanger.
La crise actuelle n'est donc pas simplement conjoncturelle, elle est structurelle. D'après la FPI, le marché du neuf est entravé par des facteurs complexes qui exigent une réponse globale et coordonnée. Une baisse des prix ne suffira pas à résoudre la crise si elle n'est pas accompagnée de mesures pour relancer la production et répondre à la demande réelle des ménages. Exemple avec une aide aux investisseurs en marge de la fin annoncée de la loi Pinel à compter de 2025.
Le bon point de la Cour des comptes pour le dispositif Pinel
Le dispositif Pinel, souvent critiqué, semble pourtant s'avérer essentiel pour soutenir l'investissement locatif neuf. C'est même la Cour des comptes qui vient de souligner dans un rapport publié ce jeudi qu'il apporte « une réponse plutôt efficace aux besoins de logement exprimés par les ménages modestes bénéficiaires ». Toujours selon l'institution, le dispositif permet « la requalification urbaine » et le financement partiel du logement social à travers des programmes mixtes, afin ainsi de contribuer à « la mixité de l'habitat » et à la création de résidences thématiques pour divers publics, comme les seniors ou les jeunes actifs. Le rapport note que « le respect des plafonds de revenus » et des loyers garantit l'accessibilité de ces logements, tandis que la vacance locative est quasi-inexistante. Contrairement aux critiques de standardisation, la Cour constate « la qualité du bâti et des prestations proposées » dans les résidences visitées, telles que « la présence d'un extérieur, local à vélos, salle de sport dans les résidences étudiantes ». Dans un marché en crise, la Cour des comptes regrette d'ailleurs que rien n'est été prévu pour le remplacer, d'où l'appel de la FPI aux « décideurs politiques, à ne pas stopper ce dispositif, mais à le maintenir voire le renforcer ».
En clair, la stratégie de baisse des prix souhaitée par le gouvernement a échoué et la crise se traduit désormais par une contraction des volumes, tant en termes de ventes que de mises en vente. Si rien n'est fait pour remédier à cette situation, la crise du logement, déjà profonde, pourrait encore s'aggraver, avec des conséquences dramatiques pour les ménages et les professionnels du secteur. D'autant plus avec la disparition annoncée de la loi Pinel au 31 décembre 2024. Le futur gouvernement de Michel Barnier devra impérativement repenser sa politique du logement pour éviter une spirale de pénurie et de dégradation du marché, préviennent les promoteurs.